Le jour où l'avion du président bolivien a été forcé d'atterrir sur injonction américaine
Soupçonné de transporter le lanceur d'alerte Edward Snowden, l'avion du président Evo Morales a été forcé d'atterrir en Autriche le 2 juillet 2013. Sous pression américaine, de nombreux pays européens avaient refusé le survol de leur espace aérien.
Alors que les puissances occidentales ont allègrement condamné l'attitude de la Biélorussie qui a arrêté l'opposant Roman Protassevitch à Minsk après que son avion a été contraint d'atterrir en urgence sur injonction des autorités, ce n'est pas la première fois qu'un ou plusieurs Etats prennent des mesures de suspension ou de détournement de vol pour faire valoir leurs intérêts nationaux.
Le 1er juillet 2013, alors que l'ancien informaticien de l’Agence nationale de sécurité (NSA) Edward Snowden a trouvé refuge dans un aéroport de Moscou après avoir révélé un mois plus tôt le système de surveillance massif et secret utilisé par les autorités américaines, le président bolivien Evo Morales est en déplacement en Russie pour une visite d'Etat. Dans une interview accordée à la chaîne de télévision RT, Evo Morales évoque son intention d'offrir l'asile à Edward Snowden alors que l'informaticien est présent sur le sol russe pour fuir la lourde peine qui l'attendait aux Etats-Unis.
Un vol dérouté vers l'Autriche et un examen mené à l'intérieur de l'appareil
Le lendemain, le président Morales doit rentrer en Bolivie et décolle à bord d'un Falcon 900 de l'aéroport de Vnoukovo en Russie. Quelques instants après le décollage de l'appareil, les autorités boliviennes sont informées de la décision brutale de la France, l'Espagne, l'Italie et le Portugal d'interdire le survol de leur espace aérien à l'avion du Président bolivien. Les autorités américaines soupçonnent fortement Evo Morales de transporter Edward Snowden et exercent une forte pression sur leurs partenaires européens afin de contraindre l'avion à se poser.
Le vol est donc dérouté vers l'Autriche où le pilote se posera à Vienne, incapable d'effectuer le vol sans faire l'escale prévue en Espagne avec ses faibles réserves de carburant. Comme le rapporte Libération, sur le tarmac, les équipes du président doivent descendre de l'avion et les forces de l'ordre autrichiennes examinent l'intérieur de l'appareil pour s'assurer que l'analyste tant recherché par les Américains n'est pas à bord. Cette escale forcée durera 13h et sera qualifiée par le président bolivien «d'agression» envers l'Amérique latine. L’avion, bloqué toute une nuit à Vienne, repartira le lendemain vers 11h45 où il fera escale aux îles Canaries avant de rejoindre la Bolivie.
«Nous avons déterminé qu'il semblait y avoir une rumeur infondée sur la présence de monsieur Snowden à bord de l'avion», déclarait le 3 juillet le ministre bolivien des Affaires étrangères, David Choquehuanca alors que son homologue de la Défense, Ruben Saavedra, soupçonnait publiquement le département d'Etat américain d'être derrière cette décision. «Nous avons des soupçons sur le fait que ces pays ont été manipulés par une puissance étrangère, en l'occurrence les Etats-Unis, afin d'intimider l'Etat bolivien et le président Evo Morales», précisait-il le même jour.
Le 24 mai, l'Ukraine suspend toutes les liaisons aériennes avec la Biélorussie
Comme le rapporte Sputnik, un autre incident de vol a eu lieu le 22 octobre 2016, lorsque les autorités ukrainiennes ont décidé de contraindre un avion biélorusse à atterrir à Kiev sous la menace d’une interception par un avion de chasse. Si les raisons demeurent encore obscures, le Boeing 737-800 de la compagnie Belavia qui effectuait le vol B2-840 entre Kiev et Minsk avait été contraint de retourner à l'aéroport de Kiev, alors que 136 passagers et six membres d'équipage se trouvaient à bord.
Une tension aérienne de longue date entre les deux pays qui trouve un écho particulier ce 24 mai, puisque la présidence ukrainienne a ordonné l'arrêt des liaisons aériennes directes avec la Biélorussie et le survol du territoire de ce pays en provenance ou à destination de l'Ukraine, au lendemain de l'interception par la Biélorussie de l'avion de ligne qui transportait l'opposant Roman Protassevitch. Le président Volodymyr Zelensky a «chargé le gouvernement» de mettre en œuvre sa «décision sur l'arrêt de liaisons aériennes directes entre l'Ukraine et la Biélorussie et de fermer l'espace aérien de la Biélorussie pour les vols depuis l'Ukraine ou à destination de notre pays», selon un communiqué de la présidence cité par l'AFP.
Cette décision affectera notamment les passagers voyageant entre l'Ukraine et la Russie qui utilisaient souvent Minsk comme escale, les vols directs entre ces deux pays voisins ayant cessé en 2015. La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a par ailleurs jugé «surprenante» la réaction coordonnée de la part des représentants d'un certain nombre de pays occidentaux et d'organisations internationales, dont l'UE, l'OTAN et l'OSCE, rappelant qu'ils avaient «réagi différemment à des événements similaires qui s'étaient auparavant produits dans d'autres pays» et invitant toutes les puissances à s'abstenir du «deux poids deux mesures».