Extension de l'OTAN, Ukraine... Rencontre entre Sergueï Lavrov et Antony Blinken à Genève
Le ministre russe des Affaires étrangères et son homologue américain discutent ce jour en Suisse des tensions qui s’accumulent autour du dossier ukrainien. Plusieurs rencontres entre les deux diplomaties ont lieu ces derniers jours, sans succès.
Emmanuel Leroy, président l’institut 1717, commente pour RT France les discussions entre le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et son homologue américain Antony Blinken de ce 21 janvier.
«Nous continuons à définir et à affiner les conséquences qu'aurait une action de la Russie en matière économique notamment», a averti Antony Blinken.
«L'Ukraine est un partenaire majeur des Etats-Unis et d'autres Etats européens» soutient Antony Blinken.
«Nous sommes tombés d'accord aujourd'hui sur le fait que nous partagerons nos idées, nos réponses aux préoccupations évoquées par la Russie, par écrit la semaine prochaine», ajoute-t-il. Les Etats-Unis se disent prêts à des rencontres ou échanges téléphoniques entre Joe Biden et Vladimir Poutine «pour faire avancer la situation».
Revenant sur le dossier ukrainien, Antony Blinken a expliqué que les Etats-Unis apportaient «une assistance militaire défensive à l'Ukraine».
Sur le dossier du nucléaire iranien, Antony Blinken a déclaré que la Russie comprenait «l'urgence de la situation», espérant que Moscou «utilisera son influence sur l'Iran».
«La Russie s'est engagée dans la voie de la diplomatie», reconnaît-il tout en déplorant, dans le même temps, qu'elle «continue à renforcer sa présence militaire à la frontière ukrainienne».
«Si la Russie souhaite convaincre le monde qu'elle n'a pas d'intention agressive envers l'Ukraine, une première étape pourrait être de retirer ses forces de la frontière», affirme Antony Blinken.
«Les autorités russes ont déclaré n'avoir aucune intention d'envahir l'Ukraine, monsieur Lavrov l'a répété aujourd'hui, mais nous nous fondons sur ce qui est visible à tout à chacun», souligne le secrétaire d'Etat américain.
Disant s'appuyer sur «l'Histoire», Antony Blinken affirme que la Russie «a envahi l'Ukraine en 2014, a pris possession de la Crimée et a changé les frontières au niveau du Donbass par la force».
«Et nous avons constaté diverses tentatives de déstabilisations [de la Russie], certaines par la force, [...] pour renverser [le] gouvernement [ukrainien]», soutient Anthony Blinken.
Ce 21 janvier, le ministre russe des Affaires étrangères et le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken se rencontrent à Genève. Au menu : la situation autour de l'Ukraine, que les Etats-Unis et leurs alliés européens accusent la Russie de vouloir envahir, tandis que Moscou demande notamment l'arrêt de l'extension de l'OTAN ainsi qu'une limitation des déploiements militaires à ses frontières.
L'aboutissement de plusieurs rencontres diplomatiques infructueuses
Durant la deuxième semaine de janvier, des représentants de la diplomatie russe se sont entretenus avec des responsables du gouvernement américain, de l'OTAN et d'organisations internationales. Des rencontres qui ont fait suite à la présentation par la Russie mi-décembre de deux projets de traités, l'un destiné aux Etats-Unis et l'autre à l'OTAN, résumant ses exigences pour une désescalade des tensions en Ukraine, Moscou souhaitant assurer sa sécurité face à des «provocations» de Kiev et des Occidentaux.
Le 10 janvier ont eu lieu à Genève plus de sept heures de pourparlers russo-américains à huis clos, à l'issue desquels le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov avait déclaré que la «situation n'était pas désespérée». La diplomate américaine Wendy Sherman avait de son côté expliqué que Washington avait prévenu Moscou que la politique de «portes ouvertes» de l'OTAN continuerait.
A l'issue d'une rencontre ayant eu lieu deux jours plus tard, le 12 janvier, avec des représentants de l'OTAN, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Alexandre Grouchko avait fait état de «quantité de divergences sur des questions fondamentales». Il avait dénoncé la politique d'«endiguement» menée par l'Alliance atlantique et prévenu que «les tentatives de bâtir la sécurité [des uns] aux dépens de la Russie et sans participation de la Russie [étaient] contreproductives».
Un groupe de sénateurs étasuniens démocrates avait récemment proposé de durcir les sanctions économiques existant déjà contre la Russie si celle-ci venait à envahir l'Ukraine. Les sénateurs en question veulent, si ce scénario se concrétisait, sanctionner plusieurs responsables russes, dont le président Vladimir Poutine en personne.
Peu avant cette semaine diplomatique, Vladimir Poutine et Joe Biden avaient eu le 30 décembre un entretien téléphonique d'un peu moins d'une heure. Qualifiant la discussion entre les deux dirigeants de «franche» et «concrète», le Kremlin a rapporté que le président russe avait déclaré à son homologue américain que l'instauration de sanctions contre Moscou constituerait «une grave erreur». Dans ses vœux adressés au président américain quelques heures avant l'appel, Vladimir Poutine s'était dit convaincu qu'un dialogue «efficace» et «fondé sur le respect mutuel» était possible. De son côté, la Maison Blanche avait assuré vouloir promouvoir une «voie diplomatique» sur le dossier ukrainien.
Moscou demande un arrêt de l'extension de l'OTAN, les Etats-Unis accusent la Russie de vouloir envahir l'Ukraine
Côté russe, les revendications portent principalement sur l'arrêt de l'extension de l'OTAN à des pays de l'ex-URSS – tels que l'Ukraine – ainsi que sur une limitation des déploiements militaires près des frontières russes. Le 15 décembre, Moscou avait à ce titre annoncé avoir remis aux Etats-Unis une liste de propositions concernant les garanties juridiques réclamées par la Russie pour assurer sa sécurité, qu'elle juge menacée.
La Russie s'inquiète entre autres du soutien militaire apporté par l'Alliance atlantique à l'Ukraine, qui s'est récemment concrétisé par les 200 millions de dollars d'«aide sécuritaire» supplémentaire promis à Kiev par l'administration Biden. Trois jours auparavant, le 16 janvier, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov avait déclaré que ce soutien militaire – qui prend également la forme d'envoi d'instructeurs militaires et d'armes, tant défensives qu'offensives – constituait une «menace imminente», tant pour la Russie que pour la sécurité de l'ensemble du continent européen. Le 20 janvier, plusieurs sources au sein du département d'Etat américain ont à ce sujet rapporté que Washington accélérait «les transferts autorisés d'équipements d'origine américaine provenant d'autres alliés». Ces demandes de transferts – qui concernent des armements, dont des missiles – proviennent de la Lituanie, de l'Estonie, et de la Lettonie, tous membres de l'OTAN.
Washington et ses alliés occidentaux accusent de leur côté la Russie de vouloir envahir l'Ukraine. Le président américain Joe Biden avait promis le 19 janvier «un désastre pour la Russie si elle envahi[ssait] davantage l'Ukraine.» Il avait également mis en garde contre de «lourdes» pertes humaines sur le champ de bataille et des sanctions «sévères» et sans précédent contre l'économie russe. «S'ils envahissent, ils vont le payer, ils ne pourront plus passer par les banques, il ne pourront faire de transactions en dollars», avait menacé le locataire de la Maison Blanche.
Ce scénario d'invasion est brandi depuis des mois malgré les multiples démentis de Moscou. «Jusqu'à présent, toutes ces déclarations étaient dénuées de preuves et n'ont été confirmées par rien», avait déclaré le 14 janvier Dmitri Peskov, répondant ainsi à des questions de la presse sur des allégations occidentales concernant une supposée provocation russe à venir dans le Donbass.
«Trouvons une sortie, trouvons des garanties», avait encouragé le porte-parole du Kremlin le 16 janvier sur CNN. «Personne ne menace personne de mener une action militaire», avait-il assuré, après avoir été interrogé sur une possible offensive russe en cas d'échec de la diplomatie, estimant que «ce serait une folie». «Mais nous serons prêts à mener des représailles» si l'OTAN n'accepte pas les demandes russes, avait-il prévenu.
Pour apaiser les tensions, Antony Blinken mise sur une «compréhension mutuelle» ce jour, comme le rapporte France 24. «Nous sommes confrontés à des problèmes complexes et les résoudre prendra du temps. Je ne m'attends pas à ce que nous les réglions à Genève», a cependant temporisé le 20 janvier le chef de la diplomatie américaine depuis Berlin.