5 400 places de prison au lieu des 15 000 escomptées : un échec carcéral français
© Wiki commonsAnnoncé en 2017 pour lutter contre la surpopulation carcérale, le plan 15 000 places de prison n’a livré que 5 411 places nettes en sept ans, selon la Cour des comptes. Face à des retards massifs et des coûts explosant à 5,7 milliards d’euros, ce programme révèle les limites d’une politique pénitentiaire française insoutenable.
Le rapport de la Cour des comptes, publié le 17 décembre 2025, dresse un bilan accablant du plan 15 000 places de prison, lancé pour résorber la surpopulation et améliorer les conditions de détention.
Malgré des objectifs initiaux clairs, les réalisations restent bien en deçà, exacerbant une crise carcérale persistante face à laquelle de nombreuses mobilisations ne débouchent pas sur des résultats.
Des ambitions freinées par des réalités budgétaires et opérationnelles
Sept ans après son annonce, le plan vise à porter la capacité des prisons à 75 000 places d’ici 2027, mais seules 5 411 places nettes ont été créées, soit 35 % de l’objectif. Avec plus de 84 000 détenus, contre 82 000 en avril, pour moins de 63 000 places disponibles en 2025, la surpopulation atteint des niveaux records. La Cour pointe des difficultés d’acquisition foncière, des procédures administratives lourdes, des contentieux et des ajustements constants qui ont touché un tiers des projets.
⚖️ Depuis 2017, le plan “15 000 places de #prison” vise à répondre à la surpopulation carcérale. En 2025, 84 000 détenus pour moins de 63 000 places, 5 411 places livrées. La Cour appelle à renforcer la gouvernance et à prioriser les investissements.
— Cour des comptes (@Courdescomptes) December 17, 2025
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Initialement estimé à 3,9 milliards d’euros, le coût a grimpé à 5,7 milliards (+46 %), la faute incombant à l’inflation, aux crises des matériaux et à un pilotage initialement défaillant. La gouvernance s’est renforcée en 2024, mais les engagements restants (3,2 milliards) pèsent sur un budget contraint par les partenariats public-privé et les besoins de rénovation d’un parc pénitentiaire datant majoritairement du XIXe siècle. Une réorientation vers 1 500 places de semi-liberté via des structures modulaires est en cours, pour 300 millions d’euros d’ici 2027, mais elle soulève des risques de surcoûts et d’inadéquation aux besoins de réinsertion. La Cour recommande de prioriser les alternatives à l’incarcération, comme les travaux d’intérêt général ou la surveillance électronique, moins coûteuses.
Cet échec s’inscrit dans une longue série de plans carcéraux français inaboutis. Le plan de 13 200 places lancé en 2002 sous Nicolas Sarkozy a connu des retards similaires, tout comme la tranche de 7 000 places antérieure au plan actuel, livrée avec des dépassements considérables
Des initiatives comme le programme de 2012 ou les annonces de 2023 sous Gabriel Attal ont également pâti de sous-financements et de surcoûts, illustrant une illusion récurrente face à une croissance ininterrompue de la population carcérale depuis 60 ans.