Le «verdissement» de la PAC n’a pas enrayé le déclin de la biodiversité en Europe
Les subventions de la politique agricole commune (PAC) décidées pour 2013-2020 devaient contribuer à arrêter la dégradation de la biodiversité. Mais selon un rapport de la Cour des comptes de l’UE, c’est un échec… pour le peu qu’on en sache.
Dans un rapport rendu public ce vendredi 5 juin, la Cour des comptes européenne déplore que «la contribution de la PAC» n'ait pas permis d'enrayer le déclin de la biodiversité des terres agricoles en Europe. Ce document public d’une soixantaine de pages rappelle, dans son introduction, qu’en janvier 2020, le Forum économique mondial a classé la perte de biodiversité et l'effondrement des écosystèmes parmi les cinq principales menaces auxquelles le monde est confronté.
Il souligne également que «dans de nombreuses régions d'Europe, l'intensification [de l’agricultute] a transformé des paysages autrefois variés, composés de nombreux petits champs et d'habitats, en un terrain homogène et continu travaillé à l'aide de grosses machines et d'une main d'œuvre fortement réduite».
Certes, la situation de la biodiversité n'est pas la même dans l'ensemble de l'Europe. Par exemple, des pays comme la Bulgarie et la Roumanie présentent encore une riche biodiversité du fait de pratiques agricoles plus traditionnelles et d'exploitations plus petites.
Mais selon le rapport, «dans d'autres Etats membres, comme les Pays-Bas et l'Allemagne, où l'agriculture intensive est beaucoup plus répandue, les scientifiques estiment qu'il est nécessaire de rétablir la biodiversité dans les zones qui ont connu une disparition des espèces, et un appauvrissement des habitats naturels au cours des dernières décennies.
Mais surtout, les auteurs constatent le peu d’effets des mesures de «verdissement» de la Politique agricole commune (PAC). Ces mesures ont fait l’objet de si peu de contrôles que le rapport avoue que l’étude d'évaluation de l'influence de la PAC sur les habitats, les paysages et la biodiversité, «n’a pas permis de réaliser une analyse d'impact globale en raison de l'absence de données de suivi adéquates».
Amendes faibles en cas de non respect des normes
Les contraintes environnementales imposées via les aides directes de la PAC sont particulièrement inefficaces, selon les auteurs de l'étude. Ils pointent du doigt des exigences qui ne s'imposent pas à tous les agriculteurs, et des amendes peu élevées (1% à 5% des aides versées).
«Le verdissement a du potentiel mais la Commission et les Etats membres ont favorisé les instruments ayant le plus faible impact [sur cet objectif]», a souligné le responsable du rapport, Viorel Stefan, cité par l’AFP.
Cet échec de la PAC avait déjà été reconnu par la Commission sur la période du budget 2013-2020. Elle a entrepris d'y remédier dans sa proposition pour la PAC post-2020, présentée il y a deux ans et toujours en négociation au niveau du Parlement européen et des Etats membres.
Selon le projet de Bruxelles, la nouvelle PAC prévoit une conditionnalité renforcée des aides directes aux agriculteurs à des critères environnementaux, ainsi que des «programmes écologiques» sur la base du volontariat.
Accroître la contribution du développement rural
La Commission vient également de présenter une nouvelle «Stratégie pour la biodiversité» à l'horizon 2030, dont certains points répondent aux problèmes soulevés dans le rapport, selon Viorel Stefan.
Dans leurs recommandations, les auditeurs suggèrent à la Commission de renforcer la «synergie» entre PAC et biodiversité ainsi que le suivi des dépenses, de mieux orienter les paiements directs, de développer des indicateurs fiables ou encore d'accroître la contribution du développement rural, pilier de la PAC plus enclin à protéger la biodiversité, selon la Cour des comptes.
Lire aussi : Le secteur de la pêche en ligne de mire après le Brexit