Des experts africains avertissent que les accords visant à accepter les expulsés des États-Unis pourraient compromettre les principes de souveraineté de l’État et transmettre le berceau de l'humanité en « décharge » pour les immigrés expulsés, souvent injustement.
Le 20 janvier 2025, le président américain Donald Trump a signé un décret ouvrant la voie à l’expulsion de ceux qu’il a décrits comme des immigrés clandestins. En le signant, le président Trump a déclaré protéger le peuple américain contre l’invasion.
Dans les mois qui ont suivi, les autorités américaines ont inscrit des dizaines d’immigrés sur leur liste d’expulsion, le centre de réflexion « Migration Policy Institute » rapportant que le nombre d’arrestations liées à l’immigration avait considérablement augmenté. Il y avait pourtant un problème : certains pays ne voulaient pas reprendre les citoyens victimes de la vague d’expulsions de Trump. Ce dernier a dû trouver un moyen de se débarrasser de ces expulsés, et l’Afrique lui est venue à l’esprit.
Le président Trump a alors approché certains dirigeants africains en vue d’accords bilatéraux sur l’accueil des expulsés. Cela a déclenché une controverse, l’Union africaine dénonçant ces projets comme une politique qui risque de transformer le continent en une « décharge » pour les expulsions arbitraires.
« Le fardeau d’un problème américain »
Livingstone Sewanyana, directeur exécutif de la Fondation de l’Initiative pour les droits de l’Homme (FHRI), basée à Kampala, la capitale ougandaise, indique qu’en acceptant les expulsés qualifiés par l’administration Trump « d’immigrés clandestins », les dirigeants africains non seulement permettraient à leurs pays de devenir un dépotoir, mais vendraient également une partie de leur identité souveraine.
« Certains expulsés sont des criminels dangereux, tandis que d’autres sont des citoyens innocents disposant de moyens juridiques limités. Il serait erroné pour les pays africains de porter le fardeau d’un problème américain », a déclaré Sewanyana à RT.
Il estime que les dirigeants africains doivent faire preuve d’audace et refuser d’accueillir les expulsés rejetés par leur pays d’origine.
« Si certains pays refusent de récupérer leurs propres citoyens expulsés, alors l’Amérique doit les garder au lieu de transférer ce problème à l’Afrique », a-t-il ajouté.
« Une atteinte à la souveraineté des nations africaines »
Le Ghana, le Rwanda, le Soudan du Sud et l’Eswatini ont déjà accueilli de tels expulsés, tandis que l’Ouganda a accepté un accord avec les États-Unis pour prendre en charge un certain nombre d’entre eux. Le Kenya envisagerait un accord de ce type, tandis que le Nigeria a refusé d’accepter les expulsés et accusé Washington d’utiliser les restrictions de visa et les hausses de droits de douane pour faire pression sur les pays africains afin qu’ils acceptent les migrants, y compris « certains qui viennent de sortir de prison. »
Ronald Kalyango Sebba, maître de conférences et spécialiste des migrations à l’université Makerere, en Ouganda, a déclaré à RT que les pays africains acceptant d’accueillir des personnes expulsées des États-Unis qui ne sont pas leurs ressortissants, le font « afin de s’attirer les bonnes grâces et les faveurs de l’administration Trump. »
Kalyango souligne que le recours de Donald Trump aux expulsions vers des « pays tiers » est « non seulement illégal, mais aussi humiliant pour les pays africains appelés à accueillir les personnes expulsées. »
« Envoyer des personnes que l’on a qualifiées de criminels vers des pays qui ne sont pas les leurs constitue non seulement une violation de leurs droits, mais aussi un manque de respect et une atteinte à la souveraineté des pays africains contraints d’accepter cet accord », a-t-il déclaré à RT.
Selon Josephine Wanjiru, chercheur au Centre d’études et d’autonomisation des réfugiés de l’université Kenyatta, au Kenya, en acceptant de servir de zone de réinstallation tierce, « les pays africains ne font que céder aux pressions extérieures et aux exigences de la politique étrangère. »
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