Pétrole : conférence exceptionnelle des pays producteurs pour relever le prix du baril
L'Arabie saoudite organise une conférence exceptionnelle des pays producteurs de pétrole pour tenter d'enrayer la crise du marché énergétique, sur fond d'épidémie. Un accord entre Moscou et Riyad sur une réduction de la production est en vue.
Les principaux pays producteurs de pétrole, ceux de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) en tête, se sont retrouvés ce 9 avril par écrans interposés pour tenter de s'accorder sur des baisses de production afin de soutenir les prix du baril qui se sont effondrés alors que sévit la pandémie de Covid-19.
Une conférence exceptionnelle cruciale pour éviter un effondrement total des prix et un arrêt de la production de certains sites. La réunion devait ouvrir la voie à un «accord équitable qui rétablira l'équilibre des marchés pétroliers», selon les autorités saoudiennes, organisatrices de la rencontre à la demande du président américain, Donald Trump.
Moins 10 à 15 millions de barils par jour
Alors que le marché était déjà en surplus avant le début de la pandémie de coronavirus, les membres de l'Opep et les autres participants, dont leurs partenaires via l'accord Opep+ et en particulier la Russie, ont ainsi discuté d'une réduction massive de la production mondiale de brut, leur arme principale face à la chute de la demande mondiale en or noir.
En effet, avec les mesures de confinement qui touchent une grande partie de la planète, l'activité économique de ce secteur est annihilée à travers le monde. De plus, les capacités de stockage de brut, qui arrivent à leurs limites vu l'effondrement actuel de la demande, obligent les pays producteurs à freiner leur production. Il s'agissait donc pour cette conférence d'aboutir à une coupe commune de «10 à 15 millions de barils par jour». Cet objectif a été confirmé par le ministre koweïtien du Pétrole Khaled al-Fadhel, cité ce 9 avril par le quotidien koweïtien Al-Rai. Ce volume, évoqué par Donald Trump le 2 avril, semble faire consensus mais c'est son partage entre pays qui s'annonce épineux.
Accord en vue, le cours du pétrole remonte
Au sortir de la réunion, une source au sein de l'OPEP citée par Reuters a affirmé que l'Arabie saoudite et la Russie étaient parvenues à un accord sur une forte réduction de la production. Une source haut placée russe, toujours citée par l'agence de presse, a confirmé l'information, expliquant que Moscou et Riyad avaient levé les principaux obstacles à tel accord.
En réaction à la nouvelle, le cours de pétrole est reparti à la hausse, le West Texas Intermediate (WTI) gagnant 12% à 28,36 dollars le baril, et le Brent 8,5% à 35,79 dollars le baril.
La Russie coopérative malgré ses dissensions avec Riyad
La Russie, chef de file des partenaires du cartel, avait affiché son intention de coopérer pour faire face à la crise. Un porte-parole du ministère de l'Energie russe avait ainsi fait savoir le 8 avril à l'agence Tass que Moscou était «prêt à réduire de 1,6 million de baril par jour» sa production. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov avait assuré le 9 avril que la Russie souhaitait une action commune coordonnée pour stabiliser les marchés mondiaux du pétrole.
Le 6 mars, avant que l'épidémie ne s'étende à l'Europe et à l'Amérique, l’échec des négociations entre les producteurs de pétrole de l’Opep menés par l’Arabie saoudite et les Etats non-membres comme la Russie a provoqué un effondrement des cours du brut. Lors de ces négociations, l’Arabie saoudite avait tenté sans succès d’obtenir une nouvelle réduction concertée de la production jusqu’à la fin de l’année. Mais la compagnie pétrolière publique russe Rosneft avait déclaré dans un communiqué, que pour la Russie cet accord avec l'OPEP+ était «dénué de sens» et qu’en cédant ses parts de marchés, la Russie n’avait fait que «céder la place» au pétrole de schiste américain.
Dans une interview à La Tribune publiée ce 9 avril, Herman Wang, spécialiste de l'Opep et du Moyen-Orient chez S&P Global Platts avait estimé que la Russie et l'Arabie saoudite «[allaient] devoir désormais mettre leur rancune de côté pour atteindre un but commun: un prix plus élevé du baril». Crise sanitaire oblige, la conférence de ce 9 avril s'est faite à distance et non au siège du cartel à Vienne. Elle sera suivie le 10 avril d'une seconde sur le même thème, cette fois-ci en présence des ministres de l'Energie du G20, toujours à l'initiative de Riyad. Devant le déficit abyssal de la demande, les cours du Brent européen et du WTI (brut américain) avaient touché la semaine dernière des niveaux plus vus depuis 2002 et bouclé le pire trimestre de leur histoire.