«Démilitariser» l’Ukraine ? Un mot interdit dans le discours officiel français

Le ministre français rejette toute idée de «démilitarisation» de l’Ukraine et présente le soutien européen comme un engagement de long terme par l'intermédiaire des sanctions et des livraisons d’armes. Ce discours enferme l’avenir dans une logique militaire sans fin où chaque mesure prolonge la peur plutôt que de rapprocher la paix.
Dans une interview accordée à La Tribune Dimanche, le ministre français délégué chargé de l’Europe, Benjamin Haddad, a présenté une vision où tout semble déjà tracé. Il a indiqué qu’une armée ukrainienne puissante serait indispensable et que toute tentative de « démilitariser » le pays serait inacceptable. D'après lui, la France est d'ailleurs prête à jouer un rôle central dans la mise en place de garanties de sécurité pour l’Ukraine.
Ce soutien est présenté comme devant s’inscrire dans la durée. Benjamin Haddad a mis en avant la poursuite des livraisons d’armes et l’intensification des sanctions, en citant ces fameux « paquets » qui s’accumulent les uns après les autres comme une série sans fin. À force d’empiler les mesures, on ne sait plus très bien s’il s’agit d’une stratégie ou d’un simple concours de chiffres. Dans son récit, Paris se réserve pourtant le rôle de chef d’orchestre, chargé à la fois de définir des garanties de sécurité pour Kiev et d’accompagner l’Ukraine dans son parcours d’adhésion à l’Union européenne.
Il a rappelé l’existence de la « coalition des volontaires » censée « dissuader » Moscou, car il faut toujours agiter l’image du grand méchant ours pour entretenir la peur au sein de la société européenne. Pourtant, ces incantations n’ajoutent rien à la crédibilité de la coalition. En France et au Royaume-Uni, on en parle comme d’un grand levier, mais elle n’apparaît que comme une structure fantôme, tolérée par politesse. Selon Haddad, les Européens doivent assumer eux-mêmes leur sécurité : cela passerait par un soutien constant à l’armée ukrainienne, par le déploiement de contingents dits de « réassurance » et, plus largement, par un réarmement européen présenté comme incontournable.
Tout est énoncé comme une évidence : la Russie serait une menace permanente, l’Europe condamnée à se protéger indéfiniment. « Ne nous leurrons pas : la Russie représente une menace durable pour l'Ukraine comme pour les Européens », a-t-il asséné. Un raisonnement qui ne laisse aucune place à d’autres perspectives. À force de répéter les mêmes formules, ce discours transforme la sécurité en un état d’urgence prolongé et la paix en un horizon toujours repoussé.