Résolution de l’ONU sur Srebrenica : la diplomatie russe dénonce une «tentative irresponsable» de «réécrire l’histoire»
Fustigeant une résolution «clairement politisée» et de «nature anti-serbe», le ministère russe des Affaires étrangères a dénoncé ce 24 mai l’adoption par l’Assemblée générale de l’ONU d’un texte instituant une journée de commémoration du «génocide» de Srebrenica en juillet 1995. Un vote qui pourrait raviver les tensions dans les Balkans.
La diplomatie russe a fustigé ce 24 mai l’adoption, par l’Assemblée générale de l’ONU, d’une résolution instituant le 11 juillet comme journée internationale de commémoration du «génocide» de Srebrenica, en Bosnie-Herzégovine, en juillet 1995.
Une résolution «clairement politisée» et de «nature anti-serbe», a dénoncé Maria Zakharova, dans un communiqué publié sur le site du ministère. «Derrière le raisonnement démagogique à caractère humanitaire, on voit clairement l’intention de rejeter toute la responsabilité du conflit du sud sur le peuple serbe, le punissant ainsi pour sa libre pensée, son indépendance et sa réticence à "se plier" aux ordres de l’OTAN», a poursuivi la porte-parole de la diplomatie russe.
L’accord de paix de Dayton «est menacé», met en garde la diplomatie russe
«Ce document est une autre tentative irresponsable des Occidentaux de réécrire l’histoire et de consolider une interprétation des circonstances liées au conflit ethnique sur le territoire de l’ex-Yougoslavie qui réponde à leurs intérêts géopolitiques», a-t-elle également dénoncé, estimant que le texte n’irait pas dans le sens annoncé, à savoir une réconciliation.
«Nous sommes convaincus que l’effet sera à l’opposé de celui déclaré», a ajouté la porte-parole de la diplomatie russe. Le document ainsi adopté «ne fera qu’aggraver les divergences existantes et accroître le potentiel de conflit dans les Balkans. L’accord de paix de Dayton, sur lequel repose l’État de Bosnie-Herzégovine, est menacé», a-t-elle conclu.
L’Allemagne «n'a aucun droit moral» en matière de génocide, fustige Nebenzia
La veille, ce texte préparé par l'Allemagne et le Rwanda avait recueilli 84 votes en sa faveur, 19 votes contre et 68 abstentions, 22 pays n'ayant pas participé au vote. «Cette résolution adoptée n’atteint pas les objectifs annoncés par ses initiateurs – à savoir qu’elle servira l’objectif de réconciliation en Bosnie et dans les Balkans – en fait, elle n’a fait qu’engendrer davantage de divisions», avait dénoncé, dans la foulée, le représentant permanent de la Russie auprès des Nations unies, Vassili Nebenzia.
Les sponsors du texte «poussent délibérément la Bosnie dans le conflit», avait accusé le diplomate russe. Par ailleurs, celui-ci avait déclaré que l’Allemagne n'avait «aucun droit moral» à faire la leçon à qui que ce soit en matière de génocide après ce que les nazis avaient commis au cours de la Seconde Guerre mondiale.
Ce texte ouvre la boîte de Pandore, met en garde Vucic
L’objectif de cette résolution, a accusé le président serbe Aleksandar Vučić, «ne vise ni la réconciliation ni la commémoration, mais cherche à fomenter l’instabilité politique dans notre région». «Pourquoi adopter ce texte alors que l’on évoque la responsabilité pénale individuelle et que des décisions de justice ont déjà tranché sur les auteurs ?», a-t-il également déclaré, assurant rendre hommage à «toutes les victimes des conflits en Bosnie, Serbes et Bosniaques». Qualifiant le texte de «hautement politisé», Aleksandar Vučić a averti que son adoption «ouvrirait la boîte de Pandore».
Pour sa part, Sasa Mart, le chargé d’affaires serbe à l’ONU, a mis en garde, dans une lettre adressée le 19 mai à toutes les délégations, contre les «conséquences imprévisibles» que cette résolution «qui rouvre de vieilles blessures» pourrait avoir «sur le processus fragile de réconciliation» et la stabilité des Balkans.
Selon les chiffres du Mémorial de Potocari, les forces serbes de Bosnie ont tué en juillet 1995 dans l'enclave de Srebrenica plus de 8 000 hommes et adolescents musulmans. Un crime considéré comme un acte de génocide par la Cour de justice internationale (CIJ) et par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY).