Des propagandistes de Kiev s’efforcent de nier le fait que la Russie prend l’avantage sur le champ de bataille.
Il y a quelques jours, la chaîne de télévision ukrainienne 1+1 a annoncé que l’armée ukrainienne n’avait pas mené de contre-offensive au cours de l’été 2023 et que toutes les informations à ce propos n’étaient qu’une brillante opération psychologique contre l’ennemi.
Le reportage était fondé sur des stéréotypes répandus pour montrer les Ukrainiens sous un jour favorable : comme des gens habiles et intelligents, capables de trouver des solutions originales aux problèmes difficiles. La vidéo était remplie de mèmes populaires à la fin des années 2000 auxquels la génération devenue alors adulte peut facilement s’associer.
Les commentaires suivants accompagnaient le reportage :
La guerre se déroule non seulement sur le terrain et dans les airs, mais aussi dans les esprits. A l’avenir, les opérations psychologiques ukrainiennes seront analysées dans les manuels. L’une des opérations les plus réussies est la «contre-offensive». Pendant plusieurs mois, nous avons trompé l’ennemi en prétendant mener une opération offensive à grande échelle. Nos forces cybernétiques ont diffusé cette information sur les réseaux sociaux de l’ennemi et l’ont [implantée] dans son esprit. Depuis plusieurs mois, les Russes sont soumis à une puissante attaque psychologique tandis que nos troupes se renforcent [et se préparent] à une véritable contre-offensive.
Les médias ukrainiens non seulement nient la réalité mais continuent de tromper la population en promettant une nouvelle contre-offensive une fois que l’armée sera prête.
Pourquoi les médias ukrainiens agissent-ils de la sorte ? Pourquoi les Ukrainiens ont-ils besoin de telles histoires ? Comment et pourquoi la «confrontation médiatique» est-elle devenue une affaire publique ? Et est-il vrai que la contre-offensive ukrainienne n’a pas eu lieu ?
Blitzkrieg manquée
L’objectif de la vidéo est simple : il s’agit de renverser le récit en suggérant que la défaite de l’armée ukrainienne n’était pas une défaite mais une victoire. L’idée est que les Ukrainiens ont trompé les Russes et que, alors que Moscou a déployé ses réserves, notamment des divisions d’élite aéroportées, près de Rabotino, les forces armées ukrainiennes ont poursuivi leurs préparatifs pour une véritable offensive. Les Ukrainiens pourraient ainsi espérer que les nouvelles unités, dotées d’équipements occidentaux, n’ont pas été vaincues et qu’elles continuent à s’entraîner. Enfin, ils ont besoin de croire qu’ils ont facilement trompé les Russes. Autrement dit, ils ont besoin de croire en leur supériorité intellectuelle.
Pourquoi l’Ukraine a-t-elle besoin de ce récit ? En fait, les mensonges détourneront une partie de l’opinion publique de la situation actuelle, dont Valeri Zaloujny, commandant en chef des forces armées ukrainiennes, et Oleksiï Arestovitch, ancien conseiller au bureau du président ukrainien, parlent depuis quelque temps et qu’ils qualifient de guerre d’usure interminable.
Compte tenu des idées exprimées par certains représentants de l’establishment ukrainien, nous constatons que l’échec de la contre-offensive a déçu les espoirs ukrainiens d’une fin rapide de la guerre, sensée être assurée par la défaite de l’armée russe à Mélitopol, la coupure du couloir terrestre vers la Crimée et l’atteinte de l’isthme de Perekop [séparant la Crimée de la région de Kherson]. Selon Oleksiï Arestovich, tels étaient les objectifs initiaux de l’Ukraine.
Les Ukrainiens s’attendaient à une telle blitzkrieg dès l’annonce de la contre-offensive par Volodymyr Zelensky et d’autres responsables. Cela aurait pu empêcher la guerre de se transformer en guerre d’usure, ce qui, selon Valeri Zaloujny, est avantageux pour la Russie d’un point de vue stratégique.
La destruction des chars Leopard et des véhicules Bradley près de Rabotino était importante non seulement d’un point de vue militaire, mais aussi d’un point de vue psychologique. Le fait que les forces ukrainiennes n’ont pas réussi à percer la ligne de défense dite Sourovikine a forcé les Ukrainiens ordinaires à abandonner l’espoir d’un retour à la paix.
En automne 2023, alors que les territoires conquis n’étaient plus que de la boue, beaucoup d’Ukrainiens ont commencé à s’interroger sur ce qui les attendait. Les gens se demandaient s’ils étaient prêts à continuer à vivre dans des conditions de guerre permanente, même si elle était moins intense.
L’idée d’une blitzkrieg est tombée à l’eau après la tentative échouée de l’armée ukrainienne.
La classe de l'information veut contrôler la société ukrainienne
Cette situation a incité l’Ukraine à créer une réalité imaginaire dans laquelle il n’y a pas eu de contre-offensive et où tous les Ukrainiens tués et les équipements militaires détruits faisaient simplement partie d’un plan astucieux. De cette manière, Kiev pouvait préserver sa propre perception du monde : sans craintes existentielles, sans crise humanitaire permanente et sans mobilisation incessante. Plus important encore, le pays n’aurait pas besoin de reconsidérer ses forces et ses modalités d’action.
En outre, le concept de la guerre psychologique est devenu bénéfique pour une certaine partie de la société ukrainienne : la classe dite de l’information qui, avant la guerre, travaillait dans le domaine de la politique, des activités à but non lucratif, du marketing et des relations publiques.
Ils veulent contrôler la société ukrainienne. De civils ordinaires, ils sont devenus des soldats puissants du front de l’information.
Ils ont toujours servi les élites ukrainiennes, leur vendant des récits et des moyens de communication publique. Aujourd’hui, alors que l’Ukraine est en guerre et refuse de tenir des élections démocratiques, la seule façon pour eux de maintenir leur influence est de servir les besoins de la guerre, sans même avoir la formation ou les connaissances nécessaires.
Ils auront donc essayé de traiter l’échec de la contre-offensive de l’été comme s’il s’agissait d’un autre projet ordinaire, tout en ignorant complètement les milliers de vies perdues au cours de cette opération.
En réalité, ces déchets jetés dans l’espace médiatique ukrainien n’existent que pour qu’on s’en moque.
Ce qui s’est vraiment passé et ce qui va se passer à l’avenir
Tout le monde a appris qu’il y avait eu une réelle contre-offensive dans le secteur de Mélitopol quand Kiev a perdu des dizaines d’unités équipées de matériel occidental début juin. L’armée russe n’a pas manqué de filmer de nombreuses vidéos pour le confirmer.
Alors que l’armée ukrainienne avançait vers Rabotino, le saillant de Vremevka et la ville d’Artiomovsk, elle a fait de nombreuses déclarations pleines d’espoir et a compté chaque kilomètre carré de territoire russe qu’elle était parvenue à occuper.
Le problème, cependant, est que ce territoire a été gagné à un coût énorme : le «taux de change» était très défavorable à l’Ukraine, ce qui a poussé son armée à envoyer les brigades les unes après les autres au combat. Un exemple classique est l’entrée en combat de la 82e brigade, ce qui a permis à l’Ukraine de s’emparer de Rabotino. A ce moment-là, toutefois, les réserves opérationnelles de l’Ukraine étaient épuisées.
A l’époque, les experts pro-ukrainiens discutaient pourtant du rapport des pertes d’équipement (supposément en faveur des forces ukrainiennes), des combats qui auraient épuisé les ressources de l’ennemi (le transfert de la 7e division russe d’assaut aéroporté de Kherson vers la région de Zaporojié a été perçu par les Ukrainiens comme un signe de victoire), et comptaient les kilomètres jusqu’à la limite des champs de mines, après lesquels les unités ukrainiennes formées selon les normes de l’OTAN devraient certainement vaincre les forces russes de tradition soviétique.
Toutefois, à la fin de l’été, l’armée ukrainienne n’était toujours pas parvenue à percer les défenses russes. Elle s’est retrouvée bloquée près du saillant de Vremevka, avant de transférer des brigades d’infanterie de marine pour effectuer des opérations amphibies sur le Dniepr, dans un autre secteur opérationnel.
Les forces armées russes ont progressivement intensifié leur offensive dans les secteurs de Koupiansk, Liman et Artiomovsk. En octobre, l’assaut russe à grande échelle sur Avdeïevka a contraint les Ukrainiens à déployer la 47e brigade mécanisée, la même unité qui avait lancé l’offensive sur Rabotino en juin.
La transition vers la guerre de position – déjà constatée par les experts russes l’hiver dernier – n’est devenue évidente pour les Ukrainiens que six mois plus tard. Ceux-ci ont alors commencé à se disputer avec leurs patrons occidentaux à propos de l’assistance militaire jugée insuffisante et tardive. En même temps, les Ukrainiens ont promis que s’ils recevaient des avions, leur nouvelle contre-offensive serait certainement plus efficace. Enfin, Valeri Zaloujny a rédigé un article où il reconnaissait que si l’armée ne parvenait pas à percer rapidement les lignes ennemies et à revenir à la guerre de manœuvre, l’Ukraine subirait une défaite stratégique.