Vaccin contre le Covid-19 : la situation délicate du président ukrainien Zelensky
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a évoqué sa frustration face à l'interdiction américaine d'exportation de vaccins contre le coronavirus. Il a affirmé qu'il est «impossible» pour son gouvernement de justifier le rejet de l'aide de Moscou.
Dans une interview accordée au New York Times publiée le 19 décembre, le chef de l'Etat ukrainien Volodymyr Zelensky a exprimé une certaine exaspération concernant la décision de Washington d'accorder la priorité aux livraisons de vaccins contre le Covid-19 aux Etats-Unis. Une frustration qui s'explique d'autant plus que la campagne de vaccination aurait pu être déjà mise en place en Ukraine, si Kiev avait choisi de coopérer avec Moscou.
Comme le précise le journal américain, «monsieur Zelensky a [...] du mal à contenir sa frustration avec monsieur Trump et son décret interdisant l'exportation de vaccins». Avant l'interdiction, l'Ukraine était en pourparlers avec Pfizer, Moderna et Johnson & Johnson pour accélérer la livraison. Elle doit maintenant se contenter de ses premières expéditions commerciales de vaccins des mois plus tard que prévu en raison du décret de Donald Trump, explique le quotidien new-yorkais.
Les autorités ukrainiennes ont pourtant écarté la possibilité de négocier avec son voisin russe pour ne pas contrarier l'orientation politique du pays. Parce que celle-ci est axée sur la confrontation avec Moscou depuis plus de cinq ans, et probablement aussi pour ne pas heurter les sentiments des nationalistes – force non négligeable dans le pays.
«Bien sûr, il est impossible d'expliquer à la société ukrainienne, alors que l'Amérique et l'Europe ne vous donnent pas de vaccins, pourquoi vous ne devez pas accepter [les vaccins] de la part de la Russie. (...) Une autre chose, c'est que nous ne devrions pas permettre à l'Ukraine de prendre le vaccin russe», a déclaré Zelensky, ajoutant qu'il n'aurait aucune preuve de «l'effet positif à 100%» du vaccin russe. «Je ne peux pas prendre la responsabilité pour un vaccin dont nous ignorons les effets. L'Ukraine fait reposer sa décision sur un vaccin sûr», a ajouté le chef de l'Etat ukrainien, lui même ayant été frappé par le virus en novembre dernier.
Le président américain Donald Trump a signé le 8 décembre un décret qui donnera, selon lui, la priorité aux livraisons de vaccins contre le coronavirus aux Etats-Unis, soulignant le fait que le pays pourrait manquer de doses après la phase initiale de vaccination. Alors que le décret fera en sorte que le gouvernement donne la priorité de la vaccination aux citoyens étasuniens, l'Ukraine risque d'attendre longtemps pour obtenir ses doses. Et la situation peut se révéler à terme critique car l'état des lieux épidémiologique reste compliqué : le pays souffre d'un système de santé vétuste qui, de surcroît, est en proie à la corruption depuis trois décennies.
Le 18 décembre, le Premier ministre Denis Shmygal a révélé que l'Ukraine pourrait recevoir son premier lot en février, notant que le gouvernement parlait à tous les fabricants de vaccins, à l'exception de ceux de Russie. La semaine dernière, le chef de l'opposition ukrainienne Viktor Medvedtchuk a qualifié le refus de Zelensky de coopérer avec Moscou de «criminel», accusant Kiev d'être «politiquement motivée sur des questions où il faut penser à la vie et à la santé du peuple ukrainien».
La Russie a commencé le 5 décembre la vaccination à grande échelle des travailleurs sociaux, des personnels médicaux et des enseignants avec le vaccin russe Spoutnik V, encore dans sa troisième et dernière phase d'essais cliniques.