Donald Trump freine l'accès au travail des immigrés pour lutter contre le chômage des Américains
- Avec AFP
Donald Trump a décidé d'opérer un nouveau tour de vis migratoire avec le gel des cartes vertes et de certains visas de travail jusqu'en 2021 au nom de la lutte contre le chômage.
Donald Trump, actuellement en campagne électorale, a décidé le gel des cartes vertes et de certains visas de travail jusqu'en 2021, en particulier dans le secteur des nouvelles technologies, pour lutter contre le chômage.
Confronté à la destruction brutale de millions d'emplois en raison des mesures de confinement liées à la pandémie de Covid-19, le président républicain avait décidé il y a deux mois de suspendre pour 60 jours la délivrance des «green cards» offrant un statut de résident permanent aux Etats-Unis, sans toucher aux visas de travail temporaire.
Empêcher au moins 525 000 étrangers d'arriver sur le marché du travail
Un nouveau décret signé le 21 juin prolongera cette «pause» jusqu'au 31 décembre et inclura cette fois plusieurs types de visas de travail, dont le H-1B, très utilisé dans le secteur des hautes technologies et octroyé chaque année à 85 000 personnes, selon un haut responsable. Sont également concernés la plupart des visas J utilisés pour les étudiants-chercheurs, les visas L de transfert inter-compagnies servant pour certains contrats expatriés, les H-2B accordés chaque année à quelque 66 000 travailleurs peu qualifiés (avec une exception pour l'industrie alimentaire) et les H-4 qui permettent aux épouses des détenteurs d'autres visas de travailler.
Selon le responsable, cette «pause» devrait empêcher l'arrivée d'au moins 525 000 étrangers et réserver leurs emplois à des Américains : «La priorité du président, c'est de remettre les Américains au travail.»
Immigration has contributed immensely to America’s economic success, making it a global leader in tech, and also Google the company it is today. Disappointed by today’s proclamation - we’ll continue to stand with immigrants and work to expand opportunity for all.
— Sundar Pichai (@sundarpichai) June 22, 2020
Sundar Pichai, le patron de Google dont le groupe est l'un des grands bénéficiaires des visas H-1B, s'est déclaré «déçu» par cette annonce. «L'immigration a immensément contribué au succès économique de l'Amérique pour en faire un leader mondial dans les technologies», a-t-il tweeté. Il a par ailleurs assuré que la multinationale continuerait de soutenir le travail des immigrés pour «élargir les possibilités pour tous».
Le décret survient alors que Donald Trump est aux prises avec deux grands, Twitter et Snapchat, qui ont masqué ou signalé des messages du président, lequel a signé en mai un décret pour limiter la protection judiciaire des réseaux sociaux.
Attirer des immigrés qualifiés
Pour sa part, le haut responsable a fait valoir que le décret répondait à la forte hausse du chômage (13,3% de la population active en mai contre 3,5% en février) liée à la pandémie.
Cela éliminera la compétition pour les Américains aux postes de débutants et nous aidera à attirer les meilleurs, les plus doués
Il a souligné que le gel des visas H-1B était temporaire et que l'administration allait préparer une réforme pour qu'en 2021 ils soient attribués aux étrangers les plus qualifiés et non plus par loterie. «Cela éliminera la compétition pour les Américains aux postes de débutants et nous aidera à attirer les meilleurs, les plus doués», selon lui. Le responsable a ajouté que le gouvernement allait adopter de nouvelles réglementations qui rendront plus difficile l'accès légal à l'emploi pour des dizaines de milliers de demandeurs d'asile en attente d'une décision de justice. Avec des délais qui peuvent aller jusqu'à deux ans, l'administration a observé que beaucoup demandaient l'asile pour obtenir des permis de travail.
Ceux qui pensent que l'immigration légale, et particulièrement les visas de travail, nuisent au travailleur américain ne comprennent pas l'économie américaine
Ces annonces ont immédiatement suscité des réactions : le sénateur républicain Ted Cruz, un proche du président, a salué un «acte important» mais, fait inhabituel, le sénateur républicain de Caroline du Sud Lindsay Graham, d'ordinaire fervent soutien du président, s'est montré critique envers «un frein pour notre reprise économique». «Ceux qui pensent que l'immigration légale, et particulièrement les visas de travail, nuisent au travailleur américain ne comprennent pas l'économie américaine», a-t-il tweeté.
Those who believe legal immigration, particularly work visas, are harmful to the American worker do not understand the American economy.
— Lindsey Graham (@LindseyGrahamSC) June 22, 2020
«Ce n'est ni une réponse à la pandémie, ni une réponse économique», a jugé Andrea Flores de la puissante association de défense des droits civiques ACLU, dénonçant «une instrumentalisation de la pandémie [...] pour remodeler nos lois migratoires sans passer par le Congrès».