Sous la pression des ONG, la France renonce à livrer six navires à la Libye
Inquiètes du sort des migrants en Libye, plusieurs ONG se sont félicitées que Paris renonce à livrer six embarcations rapides à ses autorités. Le pays est plongé dans le chaos depuis la chute de Mouammar Kadhafi, après une intervention de l'OTAN.
La France devait livrer six navires à la Libye pour renforcer le contrôle de ses côtes, mais il n'en sera rien. «Si la cession a été un temps envisagée au bénéfice de la Libye, la ministre a finalement décidé de ne pas livrer les embarcations à cet Etat», écrit le 26 novembre le ministère des Armées dans un mémoire envoyé à la Cour administrative d'appel de Paris, révélé par l'AFP ce 2 décembre. Il s'agissait de six embarcations rapides, des semi-rigides Sillinger de 12 mètres.
Comment expliquer ce revirement ? Huit ONG, dont Médecins sans frontières et la Ligue des droits de l'homme, avaient saisi la Cour d'appel de Paris pour demander l'annulation de cette livraison, invoquant notamment la situation des migrants dans le pays. Si la justice n'a pas encore statué dans cette affaire, le ministère des Armées a pris les devants, invoquant «la situation en Libye» qui «ne permet pas de réaliser ce don d'embarcations».
Le pays est plongé dans le chaos depuis la chute du gouvernement de Mouammar Kadhafi en 2011, après une intervention de l'OTAN à laquelle a notamment pris part la France. Divisée, la Libye est actuellement secouée par un conflit armé entre les forces du maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l'Est, et son rival installé à Tripoli, le Gouvernement d'union nationale (GNA) reconnu par l'ONU.
Les ONG crient «victoire»
Lola Schulmann, chargée des questions migratoires chez Amnesty international (qui figure parmi les ONG ayant saisi la justice administrative en avril) a estimé que la décision de ne pas livrer les embarcations constituait «une victoire importante» obtenue grâce à «la pression publique». «[Cette décision doit] marquer un tournant dans les relations de la France avec la Libye en matière de politique migratoire», a-t-elle ajouté.
Dans un communiqué commun publié le 2 décembre, les huit ONG se félicitent de l'abandon de cette initiative «qui aurait fait de la France la complice officielle des crimes commis sur les personnes migrantes et réfugiées en Libye».
Elles demandent désormais à Paris de poser «des conditions strictes à toute coopération bilatérale et européenne avec la Libye afin que les droits et la sécurité» des migrants «soient garantis et respectés».