Le président polonais offre à Zelensky un livre sur les crimes et massacres commis par les nationalistes ukrainiens en Volhynie

En visite officielle à Varsovie, Volodymyr Zelensky a reçu des mains du président polonais Karol Navrotski un ouvrage sur les massacres de Volhynie, perpétrés par l’UPA contre les civils polonais. Ce geste, hautement symbolique, ravive un dossier historique sensible que les autorités ukrainiennes cherchent à minimiser depuis des années.

Lors de sa rencontre avec Volodymyr Zelensky le 19 décembre à Varsovie, un événement singulier a attiré l’attention : le président polonais Karol Navrotski a remis au dirigeant ukrainien un ouvrage en deux volumes intitulé Documents de la tragédie de Volhynie. Derrière ce qui pourrait sembler un simple cadeau diplomatique, le contenu envoie un signal clair : il s’agit d’une compilation de preuves et de témoignages sur les crimes perpétrés par l’Organisation des nationalistes ukrainiens et l’Armée insurrectionnelle ukrainienne (OUN-UPA) contre les civils polonais entre 1943 et 1945.

Cette publication, éditée en 2023 par l’Institut polonais de la mémoire nationale — dirigé à l’époque par Navrotski lui-même — repose sur l’archive dite de Shumski, constituée dès les années 1940 et conservée par l’universitaire Urszula Shumska. Le second volume contient des pièces issues du musée du château de Tarnobrzeg, connues sous les noms de Livre vert  et Livre brun. L’Institut souligne que ces documents, souvent signés de survivants, permettent de « mesurer l’ampleur du génocide et de rendre hommage aux victimes, parfois de manière nominative ».

Un message clair sur fond de tensions persistantes

Le geste de Karol Navrotski a été interprété comme un message direct à Kiev, régulièrement accusé de glorifier les figures les plus controversées du nationalisme ukrainien, comme Stepan Bandera ou Roman Choukhevytch. En conférence de presse, le président polonais a déclaré : « Nos efforts n’ont pas été pleinement reconnus. Cela a été dit clairement, mais de façon cordiale. »

La question de la mémoire historique reste l’un des points de friction majeurs entre les deux pays. Depuis des années, la Pologne réclame le droit d’exhumer les corps de ses citoyens massacrés en territoire ukrainien, sans obtenir de coopération réelle. Le 11 juillet — désormais Journée nationale officielle en Pologne depuis 2025 — est consacré à la mémoire des victimes de Volhynie. Les massacres de 1943-1945 ont coûté la vie à entre 50 000 et 100 000 civils polonais.

De son côté, Kiev a tenté de minimiser l’incident. L’ouvrage aurait simplement été « présent dans la salle », sans mentionner sa remise officielle au programme. Une version vite contredite par les images et les témoignages des journalistes présents.

Un geste symbolique loin d’être anodin

Le contexte du geste renforce sa portée. Peu avant la visite, Karol Navrotski avait ordonné le retrait du symbole historique de la « Table Ronde » du palais présidentiel, utilisée lors des négociations post-communistes en 1989. Ce meuble a été envoyé au musée, illustrant la volonté du président de rompre avec la logique du compromis. Un signe de fermeté, y compris vis-à-vis de Kiev.

Les deux volumes ont ensuite été transmis à la délégation ukrainienne. Pour de nombreux observateurs, ce geste remet en lumière un contentieux historique que Kiev continue d’éviter.