Finlande : Moscou réagira à tout déploiement d’armes nucléaires de l’OTAN, met en garde l’ambassadeur russe
L'ambassadeur de Russie à Helsinki a déclaré, dans une interview publiée ce 6 avril, qu’un déploiement d’armes nucléaires de l'OTAN en Finlande «ne restera pas sans réponse». Neutre durant des décennies, Helsinki a entrepris un revirement diplomatique depuis plusieurs années, jusqu'à intégrer en avril 2023 le bloc militaire piloté par Washington.
«Une démarche provocatrice aussi grave ne restera pas sans réponse de la part de la Russie», a déclaré à l’agence TASS l'ambassadeur russe à Helsinki, Pavel Kouznetsov, évoquant un éventuel déploiement d’armes nucléaires de l’OTAN en Finlande. «Des mesures spécifiques seront élaborées en fonction des menaces réelles que ces actions feront peser sur notre sécurité» a assuré le diplomate, dans cette interview publiée le 6 avril, avant d’ajouter : «nous espérons cependant que la raison prévaudra toujours».
Ce dernier met en avant que les autorités finlandaises prévoient d’entamer l’examen, au printemps 2025, d’un projet de loi modifiant la loi sur l’énergie nucléaire. Kouznetsov a ajouté que le gouvernement finlandais envisageait d’y inclure une proposition changeant la doctrine d’Helsinki vis-à-vis du pendant militaire de l’atome. «Dans les conditions actuelles de folie de l'OTAN, les atlantistes locaux déclarent que rien ne devrait s'opposer aux opérations du bloc, si elles sont considérées comme appropriées, et c'est pourquoi, disent-ils, les dispositions pertinentes de la loi doivent être révisées», a déclaré aux journalistes l’ambassadeur.
Une perspective d’autant plus probable que le nouveau président du pays, Alexander Stubb, élu mi-février, s’est montré clair au sujet de l’arme atomique. «Je partirais du principe que nous, en Finlande, devons disposer d’une véritable dissuasion nucléaire et c'est ce que nous avons, car l'OTAN nous donne pratiquement trois moyens de dissuasion grâce à notre adhésion», avait-il déclaré le 1er mars, lors de sa première conférence de presse en tant que président. Alexander Stubb avait alors mis en avant la dissuasion nucléaire, «qui vient des États-Unis».
Une dissuasion qui prend la forme de la bombe tactique américaine B-61, dont une centaine d’exemplaires sont déployés en Europe (en Allemagne, Belgique, Italie, Pays-Bas et Turquie) via le partage nucléaire de l’OTAN. En Scandinavie, les Norvégiens et les Danois, membres fondateurs de l’Alliance, ont refusé l’installation de bases permanentes ou d’armes nucléaires sur leur sol. Mais, dès novembre 2022, six mois avant l’intégration de la Finlande dans l’OTAN, l’ex-Première ministre Sanna Marin avait laissé la porte ouverte à un possible déploiement d’armes nucléaires de l’Alliance sur le territoire du pays.
Les Finlandais majoritairement opposés à la présence d’armes nucléaires sur leur sol
Par ailleurs, en décembre 2023, le ministre de la Défense finlandais avait signé à Washington un accord de coopération en matière de défense (DCA). Dans le cadre de cet accord bilatéral, qui selon la presse finlandaise «s'inscrit dans la continuité de l'adhésion de la Finlande à l'OTAN», Helsinki accordera aux Américains l'accès à 15 sites sur son territoire où ils pourront notamment stocker des armes et des munitions ainsi que déployer des forces.
Pour autant, des sondages montrent une société finlandaise clairement opposée (77%, selon une étude de trois universités finlandaises parue en juillet 2023) à l’idée d’un déploiement de telles armes étrangères sur leur sol, ainsi qu’à leur transit (61%). «Dans la société finlandaise, à en juger par les sondages, l'idée de l'apparition de forces nucléaires étrangères sur le territoire du pays ne suscite pas une telle approbation unanime», a souligné Pavel Kouznetsov.
Depuis l’offensive russe en Ukraine et l’entrée du pays scandinave au sein de l’OTAN, les tensions sont allées grandissantes entre la Finlande et son voisin russe avec lequel elle partage plus de 1 340 kilomètres de frontière. La progression des frontières de l’OTAN vers celles de la Russie est dénoncée de manière récurrente par les responsables russes, depuis trois décennies, comme étant une menace pour la sécurité du pays et figurant parmi les facteurs ayant conduit au conflit en Ukraine.