Ce que révèlent les document internes de Twitter sur la censure de l'affaire Hunter Biden
Peu avant la présidentielle de 2020, des cadres de Twitter ont décidé d'entraver l'accès à des révélations du New York Post sur le fils de Joe Biden. Le nouveau chef de Twitter Elon Musk a décidé de révéler des documents internes sur cette décision.
Le nouveau patron de Twitter, Elon Musk, a mis en avant le 2 décembre un «fil» du journaliste Matt Taibi intitulé «le dossier Twitter», qui se base sur des informations internes rendues publiques par l'entreprise elle-même. Quelques jours plus tôt, Elon Musk avait annoncé la publication de documents internes à Twitter, sur la décision par le réseau social américain de censurer un article explosif du New York Post sur l'affaire Hunter Biden, peu avant l'élection présidentielle américaine de 2020.
Dans la foulée de la publication de l'article du New York Post à cette époque, Twitter avait en effet pris des mesures extraordinaires pour en limiter la diffusion, affichant des avertissements indiquant que celui-ci pouvait être «dangereux» et allant jusqu'à bloquer son partage par messages privés ; une mesure jusqu'alors réservée aux cas extrêmes, comme la pédopornographie. Twitter était même allé jusqu'à suspendre le compte de la porte-parole de la Maison Blanche Kaleigh McEnany pour avoir tweeté sur l'affaire, provoquant la colère du camp Trump.
Les documents internes à Twitter qui viennent d'être rendus publics – des échangent d'e-mails entre employés et avec des responsables politiques – lèvent le voile sur le processus qui a mené à cette décision controversée, prise dans l'urgence par des cadres et notamment l'ex-responsable juridique Vijaya Gadde, sans même que le patron de l'époque Jack Dorsey n'en soit informé. En filigrane, il apparaît que le climat, à savoir les accusations d'ingérence et de piratages russes en tous genres incessamment alimentées par les médias, les services de renseignement américains et le camp démocrate, auraient été le terreau de cette décision controversée de censure.
«J'ai du mal à comprendre le fondement de notre politique pour indiquer ceci comme "dangereux" et je pense que la meilleure façon de l'expliquer à l'extérieur [de l'entreprise] serait [de dire] que nous attendons de comprendre si cette histoire vient de matériels piratés. Nous allons faire face à de sérieuses questions là-dessus si nous n'avons pas une sorte de raisonnement solide pour avoir indiqué que le lien [vers l'article] était dangereux», confiait ainsi un cadre dans les échanges rendus publics par Elon Musk.
Twitter a-t-il cherché à favoriser l'élection de Biden en censurant l'affaire Hunter ?
Après la publication de l'article du New York Post, la justification des «matériels piratés» était rapidement devenu l'argument massue du réseau social pour entraver l'accès aux informations sur cette affaire.
Or cette justification était contestée en interne chez Twitter, les informations sur cette affaire provenant d'un ordinateur portable oublié par Hunter Biden dans un magasin selon le New York Post – l'ordinateur n'ayant donc pas été «piraté». «Pouvons-nous honnêtement prétendre que cela fait partie de la politique [de Twitter sur les matériels piratés] ?», peut-on ainsi voir un cadre se demander dans les échanges publiés par Elon Musk.
«Le piratage était l'excuse, mais en quelques heures, presque tout le monde a compris que ça ne tiendrait pas. Mais personne n'a eu le courage de l'inverser [la décision]», témoignait en ce sens un ancien employé cité par Matt Taibi. Rapidement, «tout le monde savait que c'était foutu», expliquait cette source. Mais l'entreprise aurait malgré tout choisi de s'entêter dans la même direction. Dans une série de messages, en octobre 2020, Twitter avait ainsi déclaré que l'article sanctionné contenait des détails personnels obtenus sans permission, ce qui constituait une violation de sa politique en matière d'«informations privées» et de «distribution de contenu piraté».
Ces échanges d'anciens e-mails révèlent par ailleurs que Twitter aurait supprimé des tweets sur la suggestion de l'équipe de campagne de Joe Biden. «C'est traité», affirmait ainsi un employé en réponse à un autre qui lui demandait de les passer en revue, le 24 octobre 2020, soit 10 jours après la publication de l'article du New York Post.
8. By 2020, requests from connected actors to delete tweets were routine. One executive would write to another: “More to review from the Biden team.” The reply would come back: “Handled.” pic.twitter.com/mnv0YZI4af
— Matt Taibbi (@mtaibbi) December 2, 2022
«Voilà à quoi ressemble la collusion», dénoncent les républicains
S'il est impossible – en l'état – de connaître le contenu des tweets supprimés, le camp républicain n'a pas attendu pour ouvrir les hostilité : «Voilà à quoi ressemble la collusion», peut-on notamment lire sur le compte Twitter des républicains de la Chambre des représentants.
«Nous apprenons en temps réel comment Twitter a collaboré pour faire taire la vérité sur l'ordinateur portable d'Hunter Biden, quelques jours avant l'élection présidentielle de 2020», a insisté le leader républicain de la Chambre des représentants Kevin McCarthy, laissant entendre que son camp demanderait l'ouverture d'une enquête dès l'entrée en fonction de leurs nouveaux élus, en janvier prochain.
Biden accusé d'avoir cherché à entraver une enquête impliquant son fils
Pour rappel, les révélations faites dans l'article du New York Post, datant du 14 octobre 2020, se montraient potentiellement compromettantes pour Joe Biden, à l'approche de la présidentielle américaine.
Le candidat démocrate fait l'objet d'accusations pour avoir prétendument aidé à mettre un coup d'arrêt à une enquête pour corruption impliquant son fils en Ukraine. Plus précisément, l'ancien vice-président (2009-2017) de Barack Obama est accusé d'avoir conditionné une aide financière à l'Ukraine au renvoi du procureur ukrainien Viktor Chokine, qui enquêtait sur le groupe gazier ukrainien Burisma, comptant dans son conseil de surveillance Hunter Biden. Or, si Joe Biden a toujours nié avoir évoqué les activités étrangères de son fils lorsqu'il faisait partie de l'administration Obama, un e-mail présumé datant d'avril 2015 et révélé par le New York Post montrerait qu'il aurait été présenté par son fils à un représentant de Burisma.