Emmanuel Macron rencontre Elon Musk sur fond d'inquiétudes européennes sur la modération de Twitter

Le président français a rencontré le milliardaire libertarien Elon Musk, dans le collimateur de la Commission européenne qui s'inquiète de sa vision de la liberté d'expression et ses répercussions sur la modération de Twitter.

Emmanuel Macron et Elon Musk se sont félicités le 2 décembre d'avoir échangé sur la modération des contenus sur Twitter, sur fond de tensions larvées entre le milliardaire et la Commission sur le futur de la plateforme.

«J'en parle ici, sur Twitter, car c'est de cela qu'il s'agit. Cet après-midi, j'ai rencontré Elon Musk et nous avons eu une discussion claire et sincère», a écrit Emmanuel Macron, en visite d'Etat aux Etats-Unis.

L'entretien a eu lieu à la Nouvelle-Orléans (Louisiane) et a duré une heure. Il n'avait pas été précédemment annoncé par l'Elysée, et s'est tenu à l'écart des médias.

«Conditions d'utilisation transparentes, renforcement significatif de la modération des contenus et protection de la liberté d'expression : Twitter doit faire l'effort de se conformer à la réglementation européenne», a ajouté le chef d'Etat dans une série de tweets. Les discussions entre le chef d'Etat et le cofondateur de Tesla auraient aussi porté sur de «futurs projets industriels verts, comme la production de véhicules électriques et de batteries». 

«C'était un honneur de vous voir à nouveau», a répondu Elon Musk, se disant «impatient» au sujet de «projets enthousiasmants en France». 

L'homme le plus riche au monde a racheté fin octobre l'influente plateforme Twitter pour 44 milliards de dollars. Sa vision absolutiste de la liberté d'expression inquiète une partie des autorités politiques et des annonceurs, qui disent craindre un déferlement de haine et de désinformation.

La liberté d'expression «implique des responsabilités et des limites», défend Macron

«Elon Musk a confirmé la participation de Twitter à l'Appel de Christchurch. Les contenus terroristes et violents n'ont leur place nulle part», a détaillé le président français à ce propos, faisant référence à une initiative lancée par plusieurs Etats et ONG en 2019, après la tuerie de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, dont les images étaient restées accessibles en ligne pendant plusieurs heures. L'homme d'affaires n'a pas réagi sur ce point.

Il avait initialement promis un conseil de modération des contenus responsable de toutes les décisions majeures, mais il a finalement lui-même décidé de rétablir de nombreux comptes, à commencer par celui de l'ex-président américain Donald Trump, banni après l'émeute du Capitole en janvier 2021. Un sondage proposé aux utilisateurs du réseau sur ce dernier point avait donné une majorité d'avis favorables au retour du président américain. 

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Il a aussi mis fin à la lutte contre les fausses informations liées au Covid, ce qui est un «gros problème», selon Emmanuel Macron. «Je pense que nous devons prendre le sujet à bras le corps, je suis en faveur de l'exact opposé, plus de régulation. Nous le faisons [en France] et nous le faisons au niveau européen», a-t-il déclaré le 1er décembre lors d'une interview accordée à la chaîne ABC.

La liberté d'expression «implique des responsabilités et des limites. Vous ne pouvez pas sortir et tenir des propos racistes ou antisémites, c'est un point qu'il m'importe de défendre», a-t-il ajouté.

Déjà le 30 décembre, le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, avait dit à Elon Musk qu'il restait «encore un énorme travail à accomplir». Twitter devra «renforcer considérablement la modération des contenus [...] et s'attaquer avec détermination à la désinformation», avait-il ajouté, selon un compte rendu de leur échange téléphonique.

Restructuration massive

Le nouveau propriétaire de Twitter, dont l'entreprise est très déficitaire, a licencié plus de la moitié des employés du groupe californien, et les équipes de modération des contenus n'ont pas été épargnées.

Selon plusieurs ONG, dont le Center for Countering Digital Hate, les messages à caractère raciste, homophobe, misogyne et antisémite ont augmenté de façon «choquante» sur la plateforme depuis un mois.

«Complètement faux», a tweeté Elon Musk en réponse à un article du New York Times détaillant les conclusions des associations. Il a affirmé que le nombre de fois où des tweets contenant des discours de haine sont vus par des utilisateurs «continue à décliner».

Kanye West banni pour avoir fait l'éloge d'Hitler 

L'entrepreneur libertarien a récemment clarifié ses limites personnelles à la liberté d'expression. Le compte du rappeur américain Kanye West a ainsi été suspendu pour «incitation à la violence», après notamment la publication de propos admiratifs d'Hitler.

Et Elon Musk est opposé au retour d'Alex Jones, commentateur controversé américain condamné pour diffamation pour avoir affirmé qu'un massacre dans une école était qu'une mise en scène pilotée par des opposants aux armes à feu.

Ayant vécu la mort de son premier enfant, le multimilliardaire a expliqué être «sans merci vis-à-vis de quiconque utiliserait les décès d'enfants pour [engranger des] gains financiers, politiques ou de renommée».

Emmanuel Macron a d'ailleurs conclu sa série de tweets en déclarant : «Nous allons travailler avec Twitter pour améliorer la protection des enfants en ligne. Elon Musk me l'a confirmé aujourd'hui. Protégeons mieux nos enfants en ligne !»