A Paris, La République en marche peut-elle survivre au fiasco Griveaux ?

A Paris, La République en marche peut-elle survivre au fiasco Griveaux ?© BENOIT TESSIER Source: Reuters
Benjamin Griveaux met dans l'embarras La République en marche (image d'illustration).
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Le retrait de Benjamin Griveaux de la candidature à la mairie de Paris, après la parution de sextos et vidéos intimes, met un terme à une campagne désastreuse. A moins que l'affaire Griveaux ne soit finalement un mal pour un bien pour LREM...

Paris devait être la vitrine de la macronie pour les municipales. Avec l'affaire Griveaux le 14 février, elle devient un calvaire pour la majorité présidentielle. La République en marche (LREM) avait pourtant fait de la capitale et des principales villes françaises des objectifs prioritaires. Avec un ancrage local faible, le parti comptait notamment sur Paris pour limiter la casse.

Sauf que, dès le départ, la campagne pour les municipales à Paris a tourné en eau de boudin. Dès le mois de juin 2019, des candidats à la pelle se présentent en effet à l'investiture, avec une bataille d'ego entre des cadres et des membres du gouvernement : Mounir Mahjoubi, Cédric Villani, Benjamin Griveaux, Hugues Renson, Anne Lebreton ou encore Antonio Duarte. Sans compter que le macron-compatible et député centriste (Agir) Pierre-Yves Bournazel est également sur la ligne de départ. Peu à peu certains commencent à se retirer pour se rallier aux favoris. Au-delà du cas Pierre-Yves Bournazel, trois LREM maintiennent leur candidature.

Benjamin Griveaux, une personnalité clivante

LREM n'a pas d'autres choix que de créer une sorte de primaire – très start-up dans l'âme – au sein de laquelle les trois prétendants (Cédric Villani, Hugues Renson et Benjamin Griveaux) doivent, devant un jury, présenter un dossier à l'oral. Sans réelle surprise, en juillet 2019, c'est l'un des poulains d'Emmanuel Macron qui est officiellement investi : Benjamin Griveaux. Néanmoins, comme dans toute primaire, ce choix n'est pas accepté par l'un des outsiders, Cédric Villani. Celui-ci met au défi LREM de le renvoyer et poursuit son aventure parisienne. Cette dissidence était à prévoir : l'idée de primaire était contestée par la plupart des candidats macronistes, y compris par Benjamin Griveaux.

Si la macronie se divise, c'est aussi parce que Benjamin Griveaux ne fait pas l'unanimité. Il faut dire que son bilan politique ne plaide pas pour lui. Son passage au porte-parolat du gouvernement de 2017 à 2019 n'a pas été un franc succès. Ses sorties médiatiques déplaisent régulièrement – à l'image de cette déclaration : «Wauquiez, c'est le candidat des gens qui fument des clopes et qui roulent au diesel». Son ton est souvent considéré comme méprisant. Il n'est pas non plus connu pour avoir un réel don de charisme ou de sociabilité. Certains proches confessent dans Ouest-France, le 10 juillet 2019, que «son ambition et son arrogance lui valent quelques inimitiés tenaces». «Il a un mépris, un cynisme, une arrogance, une morgue», confirme sur France Info le 19 juillet 2019, le sénateur socialiste Jérôme Durain. Cette image colle à Benjamin Griveaux et ses prises de parole ne l'aident pas. Durant la campagne à l'investiture, le député de Paris n'hésite pas à insulter ou mépriser ses concurrents marcheurs ou macron-compatibles. Il qualifie de «fils de p***» l'un, d'«abruti» les autres...

Les sondages de plus en plus mauvais pour LREM à Paris

Et sa campagne va rapidement s’essouffler. Les sondages s'enchaînent et Benjamin Griveaux passe de possible favori à vaincu humilié. Si la maire sortante socialiste Anne Hidalgo ressort en effet systématiquement en tête, le parti Les Républicains – aux abois sur la scène nationale – parvient par la voie de Rachida Dati, à dépasser Benjamin Griveaux, le reléguant ainsi en troisième place. Pis, avec 16% des intentions de vote au 12 février 2020, il se retrouve même menacé par le candidat d'Europe Ecologie-Les Verts David Belliard (14,5%).

En résumé, Benjamin Griveaux n'a pas pu projeter aux Parisiens le projet d'un Paris réaliste. Semaine après semaine, il a tenté des coups de communication, avec des mesures qui ont souvent semblé farfelues : remplacer la gare de l'Est par un Central park parisien, prêter 100 000 euros aux futurs acheteurs parisiens, créer des «managers de rue», etc.

Sa récente campagne de photographies – en compagnie des têtes de liste LREM – pour le rendre «cool» dans des postures plus étranges les unes que les autres, ont également été un couac niveau com'.

Qui pour reprendre le flambeau de la macronie dans la capitale ?

A se demander in fine si l'affaire mettant en branle la macronie à Paris n'est pas un bienfait pour La République en marche afin de relancer une campagne en perdition. La mission prioritaire semble clairement de retrouver un chef de file le plus rapidement possible pour faire oublier l'affaire. Marlène Schiappa peut être la candidate idéale : une figure féminine face à Rachida Dati et Anne Hidalgo, une secrétaire d'Etat appréciée par la macronie, un rôle d'outsider à la mission délicate – le parti pouvant difficilement lui reprocher une défaite attendue. La secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes a néanmoins refusé l'hypothèse... pour l'instant. Autre possibilité : Mounir Mahjoubi, l'un des ex-soutiens de la première heure d'Emmanuel Macron. Député parisien et ex-secrétaire d'Etat chargé du Numérique, il fait partie des figures les plus connues de LREM au niveau national.

La surprise pourrait être en outre la nomination d'une tête de liste par défaut comme Hugues Renson ou Anne Lebreton, faute de trouver une personnalité médiatique.

Enfin, si le dissident et désormais exclu de LREM, Cédric Villani, est aujourd'hui crédité de 10%, celui-ci n'est-il pas finalement la meilleure carte pour La République en marche ? LREM irait alors, la queue basse, négocier avec le député de l'Essonne pour une fusion des listes LREM/Villani dans les arrondissements parisiens. Peu probable néanmoins : cette solution serait vue comme une faiblesse de La République en marche, Cédric Villani n'hésitant pas dernièrement à faire un pied de nez au parti et au président pour tenter d'atteindre l'hôtel de ville.

Bastien Gouly

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