Triste bilan du 1er tour des législatives pour l'économiste Jacques Sapir : record historique de l'abstention, opposition molle des Républicains, réformes européistes déprimant les employés. Avec environ 30% des voix, LREM peut avoir 70% des sièges.
Le premier tour des élections législatives s’est caractérisé par un taux de participation extrêmement faible. L’abstention dépasse les 51%. A titre de comparaison, il convient de rappeler que l’abstention avait été de 36% en 2002, de près de 40% en 2007 et de 43% en 2012. Nous sommes devant un (triste) record historique. Ceci indique que les électeurs sont largement insatisfaits de l’offre politique qui leur était présentée. Et peut-être qu’ils ont voulu protester contre le hold-up auquel s’est livré notre président Emmanuel Macron, avec la connivence d’une partie de la presse, au détriment de la démocratie. Dans le même temps, ces élections ont été marquées par ce que les commentateurs qualifient eux-mêmes de «vague» au profit du parti du président, La République en marche (LREM), un parti qui devrait largement remporter la majorité absolue au Parlement lors du 2e tour.
Alors que le taux d’abstention avait été bas pour l’élection présidentielle, plus d’un électeur sur deux se sont mis en position d’objection de conscience, tant par rapport à la force politique dominante, c’est- à-dire le parti du président, que par rapport aux institutions. Ce fait décrédibilise un peu plus ces dernières et fragilise la légitimité d'Emmanuel Macron et de son gouvernement. Cette «vague» pourrait bien s’avérer être un trompe-l’œil.
La République en Marche pourrait obtenir entre 70% et 75% des sièges. C’est un succès majeur, mais un succès que vient immédiatement mettre en doute la très faible participation
Un succès paradoxal ?
Ainsi, ce premier tour semble annoncer une large majorité pour le président et son parti La République en Marche. Il faudra néanmoins, attendre le second tour pour mesurer l’ampleur de ce phénomène, mais les projections faites sur la base des résultats du 1er tour lui prédisent une majorité de 390 à 450 sièges, sur les 577 que compte l’Assemblée nationale. Ainsi, avec 32% des voix, La République en Marche pourrait obtenir entre 70% et 75% des sièges. C’est un succès majeur, mais un succès que vient immédiatement mettre en doute la très faible participation.
Si ce résultat se confirme, Emmanuel Macron pourra donc mettre en œuvre sa politique, et en particulier les réformes sociales qu'il a annoncées. Diverses fuites les concernant alors qu'elle pourraient être décidées dès cet été commencent à soulever une légitime émotion.
Le gouvernement l'a mal pris et veut attaquer en justice les auteurs de ces «fuites», alors qu’il avait commencé par affirmer que ces documents ne représentaient pas la position du gouvernement. Comprenne donc qui pourra…
Outre la méthode utilisée – les ordonnances – c’est bien le contenu de ces réformes qui pose aujourd’hui problème. Mais, ces dernières en réalité sont cohérentes avec les choix européens, et mêmes européistes, du président. En fait, elles reprennent nombre des recommandations de l’Union européennes. On voit que ce qu’il y a en surplomb au-dessus de ces réformes, c’est bien la question de l’Union européenne et celle de l’euro. Les adversaires du président Macron et de son parti seront rapidement confrontés à de réelles questions de cohérence.
Cohérence tactique d’abord : vont-ils considérer que l’adversaire principal est le parti du président ou vont-ils persister à penser qu’il y a un réel danger «extrémiste» en France, un danger qui serait représenté tant par La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon que par le Front National de Marine le Pen ? De cela dépendent les consignes de désistement. Mais, ces mêmes adversaires d’Emmanuel Macron seront aussi confrontés à un problème de cohérence politique. Soit ils acceptent les présupposés du président, et ils seront en difficulté pour contester ses futures réformes, soit ils s’opposeront de manière cohérente et conséquente aux prémices de ces dernières, et ils pourront, alors, articuler une véritable critique du programme social d’Emmanuel Macron.
Il s’est agi de présenter LREM comme un mouvement appelé à «renouveler» la classe politique française et à établir de nouveaux standards d’éthique.
Le piège des législatives
On voit bien ici le piège qui a été tendu aux partis traditionnels par les responsables de La République en Marche, le parti du président, un piège qui – pour l’instant – a réussi à camoufler les divers scandales dont certains dirigeants de ce parti sont la cause. Ce piège a fonctionné en deux temps.
Tout d’abord, il s’est agi de présenter LREM comme un mouvement (et non un parti) appelé à «renouveler» la classe politique française, tout en établissant de nouveaux standards d’éthique. Qu’en réalité ce mouvement soit bien un parti, et un parti rassemblant nombre des recalés de la politique française, qu’il s’agisse du parti de François Bayrou ou qu’il s’agisse des socialistes qui se sont recasés dans LREM avec gourmandise ne semble pas avoir dérangé les communicants embauchés à grand frais par Emmanuel Macron. Que ces vieilles ganaches de la politique française se soient révélées tout aussi coupables des mêmes manquement à l’éthique, ou à la loi, comme le montre les affaires qui se sont succédées, de François Bayrou à Richard Ferrand, en passant par Marielle de Sarnez, ne semble pas non plus avoir beaucoup dérangé ces mêmes communicants. Il y a bien eu un mouvement du type «sortez les sortants» qui a massivement bénéficié à LREM même si, sur ce point, on peut penser que l’importance de l’abstention dans ce premier tour des élections législatives montre que les électeurs n’ont pas été entièrement dupes.
Dans les partis qui se partageaient traditionnellement le pouvoir, on cherche désormais à se présenter comme une opposition «constructive» au nouveau président
Mais cela n’est qu’un aspect du piège. Un autre réside dans la manière dont les communicants de LREM ont réussi à construire une fiction, celle d’une opposition entre l’extrémisme et les gens «raisonnables», dans le but d’isoler ceux qui représentaient une véritable alternative au hold-up électoral d’Emmanuel Macron. De fait, dans les partis qui se partageaient traditionnellement le pouvoir, on cherche désormais à se présenter comme une opposition «constructive» au nouveau président. Chez les survivants du parti dit socialiste, on n’hésite pas à s’afficher dans certains cas comme «majorité présidentielle». Quant aux Républicains, que l’échec de leur candidat naturel, François Fillon, a plongé dans un profond désarroi, ils hésitent entre un ralliement ouvert à LREM (ce qui est d’ores et déjà le cas du Premier ministre Edouard Philippe, de Bruno Le Maire et de Gérald Darmanin) et une forme d’opposition molle que porte l’inexistant François Baroin, promu par défaut chef de ce parti. D’ailleurs, ses membres partagent nombre de leurs convictions, en particulier dans le domaine économique et social, avec Emmanuel Macron.
Ce double piège va fonctionner de manière redoutable en raison du code électoral français. Lors du second tour, les hésitations des uns et des autres, le refus d’avoir des règles de désistement claires en faveur du candidat d’opposition le mieux placé, vont probablement aboutir à ce qu’un parti qui a obtenu à peine plus de 30% des suffrages puisse disposer de plus de 70% des sièges.
Les réformes qui viennent
C’est une situation qui est potentiellement grave en raison de la nature des réformes qu’Emmanuel Macron veut faire rapidement adopter, et de cela il ne s’en est pas caché. Pourtant, l’ampleur de l’abstention, l’une des plus importantes depuis une vingtaine d’année, montre bien qu’il n’y a aucune adhésion de masse à la politique voulue par Emmanuel Macron, et dont il a délégué l’exécution à un transfuge des Républicains choisi comme Premier ministre.
Le point principal est certainement l’abandon des règles nationales, voire des règles de branches dans un certain nombre d’activités, pour donner la priorité aux accords d’entreprises. De fait, cela aboutirait à créer une Code du Travail «à la carte» pour l’employeur.
Ces réformes, quelles sont-elles ? Le gouvernement entretient le flou sur cette question et dément, en tout ou partie, les révélations qui ont été publiées dans la presse ces derniers jours. Mais, d’un autre côté, ces mêmes révélations sont tout à fait dans la logique de ce qu’avait déclaré Emmanuel Macron avant son élection.
Le point principal est certainement l’abandon des règles nationales, voire des règles de branche dans un certain nombre d’activités, pour donner la priorité aux accords d’entreprise. Ces accords d’entreprise pourraient décider des motifs de licenciements, du niveau des salaires, du temps de travail (et donc des heures supplémentaires) ou encore laisser le choix à l’entreprise d’user des CDD. De fait, cela aboutirait à créer une Code du Travail «à la carte» pour l’employeur. Par ailleurs, les indemnités accordées par les tribunaux en cas de de licenciement abusif seraient plafonnées. Ces accords pourraient, sans que cela nécessite un accord des syndicats, être soumis directement à l’approbation des salariés de l’entreprise. De même, une grande réforme de l’assurance chômage est prévue, conduisant à une couverture dite «universelle». Mais, c’est une réforme qui, pour l’Observatoire français des conjonctures économiques, aboutira dans les faits à faire baisser les indemnités chômage. En effet, les allocations de toutes les personnes ayant des trous dans leur parcours, comme par exemple, quelques jours de battement entre 2 CDD, seraient ainsi diminuées. Cette diminution pourrait ainsi potentiellement concerner de 20% à 50% des demandeurs d'emplois, son ampleur dépendant alors des paramètres retenus, paramètres qui ne sont pas encore fixés. Enfin, le gouvernement prévoit de supprimer une partie des cotisations sociales (ce qui augmenterait techniquement les salaires) en recourant à une augmentation importante de la CSG, augmentation qui est évaluée aujourd’hui à environ 21 milliards d’euros, soit 1% du PIB, et qui serait payée par les retraités dont la pension de retraite dépasse 1 200 euros.
Ces réformes, on peut le constater à travers les projets qui ont «fuité» depuis ces derniers jours, aggravent considérablement la déjà très néfaste loi «Travail» dite aussi Loi El Khomri
Si la procédure des ordonnances est bien utilisée, alors ces réformes pourraient être adoptées dès le mois de septembre 2017. Ces réformes, on peut le constater à travers les projets qui ont «fuité» depuis ces derniers jours, aggravent considérablement la déjà très néfaste loi «Travail» dite aussi Loi El Khomri.
Au-delà du tour de passe-passe sur les cotisations et la CSG, on voit bien que toutes ces mesures tendent d’une part à fragiliser la position des salariés face aux employeurs, et c’est le produit de la logique de la négociation dans l’entreprise et non de la négociation collective, et d’autre part à faire baisser le niveau des salaires. La fragilisation de la position des salariés, provenant de l’émiettement des négociations entreprise par entreprise, aura des implications importantes sur les conditions de travail. Or ces dernières se sont déjà dégradées au cours des dernières années. La possibilité pour les entreprises de déterminer dans les faits la durée légale du travail entraînera une baisse des heures supplémentaires, qui – à son tour – entraînera une perte de salaire pour les employés. La possibilité pour les entreprises de fixer les motifs de licenciement et le plafonnement des indemnités en cas de licenciement abusif vont leur donner la possibilité d’exercer un chantage à la baisse des salaires (compte tenu de l’existence d’un important volant de chômeurs) comme à la dégradation des conditions de travail.
Une première constatation s’impose : le «marché unique», qui est l’un des piliers de l’Union européenne, produit une logique de course au «moins disant/moins coûtant» qui se propage dans l’ensemble de l’UE
Les conséquences de l’Union européenne ?
En apparence, ces réformes ont une justification. Les écarts de salaire minimum au sein de l’Union européenne sont énormes : de 9 à 1 entre la France et la Roumanie et la Bulgarie, de 3,5 à 1 entre la France et la Pologne, la Hongrie, la République Tchèque et la Slovaquie, de 2 à 2,5 pour 1 par rapport à l’Espagne, au Portugal. Le salaire minimum français est supérieur de 10% au niveau de celui du Royaume-Uni et de l’Allemagne mais de plus ces derniers pays ont des dispositions qui permettent aux entreprises, sous certaines conditions, d’embaucher sous le plafond légal. Et ceci ne concerne que les pays qui ont une loi fixant un salaire minimum, ce qui n’est pas le cas de l’Italie et de la Finlande. Bien entendu, le fait que la productivité du travail soit particulièrement élevée en France compense, en partie, ces écarts. Mais en partie seulement.
Avec le «marché unique», mais aussi la liberté de circulation totale des capitaux, les grandes entreprises peuvent développer dans les pays où le coût du travail est très bas des usines dont la productivité se rapproche rapidement de celle des usines en France. Dès lors, une première constatation s’impose : le «marché unique», qui est l’un des piliers de l’Union européenne, produit une logique de course au «moins disant/moins coûtant» qui se propage dans l’ensemble de l’UE. Si les entreprises bénéficient de cette course, les salariés sont bien entendu les premiers perdants.
Cette logique du «marché unique» aurait cependant pu être compensée par des mouvements de taux de change, produisant une réévaluation des pays où les coûts sont bas, et une dépréciation des monnaies des pays où les coûts (corrigés par la productivité) sont hauts. Mais, un tel mécanisme ne peut exister à partir du moment où existe la «monnaie unique», c’est à dire l’euro. L’euro interdit toute modification des taux de changes pour compenser les déséquilibres structurels. Par ailleurs, les taux d’inflation sont assez différents entre les pays de la zone euro (l’Union Economique et Monétaire). De ce fait, on constate que l’euro à conduit à l’existence d’un écart de 20% à 25% entre l’Allemagne (qui est la grande bénéficiaire de l’euro) et la France ou l’Italie (IMF, 2016 EXTERNAL SECTOR REPORT, International Monetary Fund, juillet 2016, Washington DC). Il a d’ailleurs était montré que le niveau de dépréciation qu’impliquerait une sortie de l’euro entraînerait des effets très positifs sur les économies, avec un surcroît de croissance de 1% par 10% de dépréciation (IMF, World Economic Outlook, Octobre 2015, Washington DC, chap. 3). Ainsi, et cela sans mobiliser d’autres ressources, la croissance de l’économie française monterait à 4% par an (1,2% + 2,8%).
Quand on ne peut pas jouer sur le taux de change pour corriger des déséquilibres importants il ne reste plus qu’à faire baisser les salaires. Telle est la logique des réformes que nous proposent tant Emmanuel Macron que son Premier ministre, Edouard Philippe
Le résultat est là : quand on ne peut pas jouer sur le taux de change pour corriger des déséquilibres importants il ne reste plus qu’à faire baisser les salaires. Telle est la logique, à peine cachée, des réformes que nous proposent tant Emmanuel Macron que son Premier ministre, Edouard Philippe. Ces réformes visent à «adapter» la France aux exigences de l’UE. Elles impliquent que le centre de décision n’est plus à Paris mais à Bruxelles, voire à Berlin.
Quelle opposition au Parlement ?
On comprend alors la nécessité d’une forte opposition au Parlement, tout d’abord pour chercher à faire annuler les aspects les plus scandaleux de ces réformes, puis, par la suite, pour pouvoir demander des comptes au gouvernement. N’oublions pas, en effet, que l’un des rôles du Parlement, outre de légiférer, est d’exercer un contrôle a posteriori sur l’action du gouvernement. Cela implique des députés qui soient indépendants de ce même gouvernement.
Car, n’en doutons pas, ces réformes ne changeront rien. Ces mesures seront évidemment profitables pour les entreprises et leurs actionnaires. Mais, elles se traduiront par une compression de la demande solvable en France. Or, la demande solvable est aussi comprimée chez nos voisins, de l’Allemagne à l’Espagne, en passant par l’Italie et le Portugal. Si les profits des entreprises vont profiter de ces réformes, le niveau général d’activité va quant à lui décliner. En effet, le volume de production dépend des anticipations quant à la demande, et de leur mouvement soit à la hausse, soit à la baisse. Si les entreprises anticipent une stagnation, voire une contraction de cette demande, elles utiliseront les moyens créés par ces réformes pour licencier encore un peu plus. Ce que va provoquer cette vague de réformes que le gouvernement et le président entendent rapidement mettre en œuvre, ce sera donc une hausse des profits, une baisse de la demande entraînant de nouveaux licenciements qui, à leur tour feront baisser la demande, entraînant encore plus de licenciements. Le gouvernement, confronté à cette situation, proposera certainement de nouvelles réformes, aggravant encore plus la situation, au début de 2019…
Si Marine Le Pen a reconnu son échec lors du débat face à Emmanuel Macron, rien n’a été dit sur les ambiguïtés qui ont précédé ce même débat, et qui ont cassé la dynamique qui se faisait jour immédiatement après le 1er tour de l’élection présidentielle
Rarement un gouvernement ne s’est apprêté à mettre en œuvre une telle politique de classe. Or, cela n’est aujourd’hui dénoncé que par les deux partis que la presse, pour une fois largement rassemblée dans son soutien à Emmanuel Macron, présente comme «extrémistes» : La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon et le Front national. Mais, ces deux partis sont dans une position de faiblesse dans ces élections.
Le Front national paye la détestable image que Marine le Pen a donné d’elle-même dans la dernière semaine de campagne de l’élection présidentielle. Si elle a reconnu son échec lors du débat face à Emmanuel Macron, rien n’a été dit sur les ambiguïtés qui ont précédé ce même débat et qui ont cassé la dynamique qui se faisait jour immédiatement après le 1er tour de l’élection présidentielle. Cela explique score relativement mauvais, avec seulement 14% des voix, bien loin de celui obtenu au 1er tour de l’élection présidentielle. Quant à La France insoumise, elle est pilonnée par une large partie de la presse, transformée pour l‘occasion en simple organe de propagande. La haine envers Jean-Luc Mélenchon qui se révèle au travers des articles est un cas d’école de comment on cherche à influencer l’électeur en jouant non pas sur son raisonnement mais sur la carte des peurs les plus primitives. Cela explique certainement que La France insoumise soit, elle aussi, avec 11% des suffrages, loin de retrouver le score qui était celui de Jean-Luc Mélenchon au soir du 1er tour de l’élection présidentielle.
Et pourtant, le nombre d’électeurs qui s’étaient portés au 1er tour sur ces deux candidats était de très loin supérieur à celui qu’avait réuni sur son nom Emmanuel Macron. C’est cette réalité qui, en fait, inspire aux soutiens de notre président cette haine ardente contre ceux qui pourraient s’opposer à lui, mais aussi – et ceci est autrement plus efficace que la haine – cette politique visant à peindre ces oppositions sous les traits de l’extrémisme. Il est aujourd’hui patent que cette politique a relativement fonctionné, car ce qui fait la force d’Emmanuel Macron n’est pas le mouvement qui le porte, mouvement somme toute fort réduit, mais bien la division des forces qui s’opposent à lui et à sa néfaste politique.
Les suffrages qui se sont portés sur les candidats qui s’opposent de la manière la plus cohérent et la plus conséquente à la ligne d’Emmanuel Macron sont du même ordre que ceux qui se sont portés en faveur des candidats soutenant cette ligne
La règle du jeu
Le système électoral français a ceci de particulier qu’il pénalise très durement la division, quand celle-ci se présente comme irréconciliable. Les résultats du premier tour des élections législatives ne traduit nulle «vague» en faveur des candidats soutenus, directement ou indirectement, par Emmanuel Macron. Les suffrages qui se sont portés sur les candidats qui s’opposent de la manière la plus cohérente et la plus conséquente à la ligne d’Emmanuel Macron sont du même ordre que ceux qui se sont portés en faveur des candidats soutenant cette ligne. Et pourtant, ces mêmes résultats laissent prévoir un succès historique pour La République en Marche au soir du second tour, le 18 juin. A l’opposé, La France insoumise n’est créditée que de 8 à 18 députés, soit au plus 3% alors qu’elle a réuni 11% des voix et le Front national entre 1 et 5 députés, soit moins de 1%, alors qu’il a fait 14% des suffrages. Cette situation porte un grave préjudice aux institutions. Elle accrédite l’idée que le «pays légal», que représentent les députés, n’est pas représentatif du «pays réel». Mais, cette situation traduit aussi certaines des incohérences des opposants à Emmanuel Macron.
Dans la semaine qui sépare le 1er du 2e tour, les forces d’opposition à Emmanuel Macron auront donc à faire un choix. Considèrent-elles que l’ennemi principal, pour reprendre une formule consacrée, est représenté par les candidats de LREM, et en ce cas sont-elles prêtes à en tirer les conséquences, ou bien considèrent-elles que le discours tenu par la presse est bien pertinent, que l’extrémisme est bien une menace en France et cèderont-elles à la division ? Si tel devait être le cas, la crédibilité et la légitimité de ces forces pour s’opposer aux projets de «réforme» du gouvernement, aux ordonnances qui nous sont promises, serait bien entendu des plus réduites.
Du même auteur : Londres de choc
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