Le président croate veut faire obstacle à l'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'OTAN
Prenant le gouvernement à contrepied, Zoran Milanovic a exprimé son hostilité à l'élargissement de l'Alliance aux deux pays nordiques. Il souhaite que la Croatie défende avant tout ses intérêts nationaux, sur l'exemple de la Turquie.
Une autre voix dissonante s'est ajoutée à celle de la Turquie dans le refus de voir la Finlande et la Suède rejoindre l'OTAN : comme le rapporte la chaîne d'information N1, le président croate Zoran Milanovic a déclaré le 18 mai en conférence de presse qu'il donnerait pour instruction à l'ambassadeur croate à l'OTAN de voter contre l'adhésion des deux pays nordiques.
Les Croates de Bosnie sont plus importants pour moi que toute la frontière russo-finlandaise
Alors même que le gouvernement croate a exprimé à plusieurs reprises son soutien à cette adhésion, Zoran Milanovic a lui confirmé son opposition, qu'il avait déjà exprimée début mai. «Je l'ai déjà dit, les Croates de Bosnie sont plus importants pour moi que toute la frontière russo-finlandaise», a-t-il affirmé, souhaitant traiter en priorité le problème de la réforme électorale, en débat dans la Bosnie voisine. Selon le dirigeant, les Croates de Bosnie sont, au sein du système complexe de représentation mis en place après le conflit des années 1990, «détruits» en tant qu'entité politique. Alors que des élections générales sont prévues en octobre 2022, les Croates craignent en effet de perdre des sièges aux différents niveaux de gouvernance du pays, dans le cadre de la répartition des responsabilités avec les Serbes et les Bosniaques. Comme le rappelait le média Euractiv fin avril, les négociations sont difficiles et suscitent le mécontentement de la Croatie.
Cette réforme électorale doit donc être la principale préoccupation, selon le président croate. Il a d'ailleurs cité la Turquie, opposée à l'adhésion des deux pays nordiques à l'Alliance atlantique, comme un exemple de pays «montrant comment se battre pour les intérêts nationaux». D'après Zoran Milanovic, «la Turquie ne bougera certainement pas avant d'avoir obtenu ce qu'elle veut», tandis que la Croatie ne se battrait pas suffisamment pour ses intérêts. «Le gouvernement n'a pas le monopole de la politique étrangère», a-t-il ajouté, jugeant que «l'Ukraine n'est pas un problème brûlant» pour le pays. Il a enfin appelé le Parlement à ne pas ratifier l'accord sur l'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'OTAN : ce refus pourrait, selon lui, susciter «un intérêt incroyable pour le problème de la Croatie».
Des positions critiquées par le gouvernement croate
Le ministre des Affaires étrangères, Gordan Grlic-Radman a qualifié les déclarations du président d'«anti-européennes» et les assimilées à du «chantage», appelant à suivre les voies légales et diplomatiques pour défendre les droits des Croates. «Le président ruine notre réputation internationale avec ses déclarations et cause des dommages politiques qui peuvent mettre en danger nos intérêts nationaux», a critiqué le ministre.
Contrairement à Zoran Milanovic, Gordan Grlic-Radman s'est dit persuadé que le Parlement croate ratifierait l'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'OTAN. Il a précisé, toujours selon la chaîne N1, qu'il avait exprimé le «soutien sans réserve» de la Croatie à la Finlande et à la Suède au cours d'une réunion informelle des ministres des Affaires étrangères de l'OTAN tenu à Berlin le week-end précédent.