Algérie : enquête ouverte après le lynchage et l'immolation d'un pyromane présumé
- Avec AFP
En Kabylie, une région actuellement en proie aux flammes, un homme accusé d'avoir déclenché un incendie a été battu à mort par une foule en colère qui aurait ensuite mis le feu à son cadavre. Une enquête a été ouverte.
Le 12 août, la justice algérienne a ordonné l'ouverture d'une enquête sur les circonstances de la mort d'un homme accusé d'être un pyromane par une foule qui l'a battu et immolé la veille, dans une région en proie à des incendies meurtriers.
Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montrent selon l'AFP un homme battu par un groupe de personnes, puis un cadavre en feu tandis que la scène est filmée. Amnesty International a dénoncé les agissements d'«une foule en colère» battant «à mort» un pyromane présumé. L'ONG a appelé les autorités à «traduire les responsables en justice».
Dans un communiqué, le ministère public algérien a affirmé que les auteurs d'un tel acte, s'il est avéré, recevraient «une punition sévère, conformément aux lois de la République, afin que ce crime odieux ne reste pas impuni».
Le procureur algérien a également indiqué que la victime avait été interceptée «à bord d’un véhicule avec deux autres individus après avoir été suspectés d’être à l’origine d’un feu de forêt», selon Interlignes. Selon cette source, un groupe a par la suite «attaqué le commissariat en usant de la violence et [a] pu faire sortir l’une des trois personnes arrêtées».
Un bénévole venu apporter son aide dans une région en proie aux incendies ?
Des habitants de Miliana ont fait part sur les réseaux sociaux de leur indignation face à cette «attaque brutale», identifiant la victime comme Jamal Ben Ismaïl, 38 ans, originaire de leur ville située 120 km à l'ouest d'Alger. «Les autorités doivent envoyer le message clair que cette violence ne sera pas tolérée», a estimé Amnesty International sur Twitter, en accompagnant son message du mot-dièse «Justice pour Djamel Ben Ismaïl».
Les autorités algériennes doivent immédiatement enquêter sur les informations selon lesquelles un jeune homme a été battu à mort par une foule en colère à Larbaa Nath Irathen, dans la wilaya de #TiziOuzou, et traduire les responsables en justice. pic.twitter.com/GWXp89GT0v
— Amnesty Algérie (@AmnestyAlgerie) August 12, 2021
La Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH) a estimé pour sa part que «les scènes du lynchage et de l'immolation du présumé pyromane, alors qu'il s'agissait d'un jeune artiste venu prêter main-forte aux sinistrés, sont choquantes». «C'est un acte barbare, c'est atroce», a déclaré la LADDH qui a appelé les autorités judiciaires à «agir immédiatement».
Comme le relève RFI, des images de Jamal Ben Ismaïl lançant des appels à la solidarité sur une chaîne de télévision locale la veille de son lynchage ont été partagées sur les réseaux sociaux. «Je suis arrivé hier [...]. Je suis venu soutenir mes frères. Ils m’ont donné une leçon de solidarité, de courage et de force», peut-on l'entendre déclarer dans cette vidéo.
Dans une déclaration aux médias locaux, le père de la victime, Noureddine Ben Ismaïl, a demandé «aux autorités de faire toute la lumière sur cette affaire et appelé au calme». Le lynchage se serait produit à Larbaa Nath Irathen, ville située dans la wilaya (préfecture) de Tizi Ouzou, l'une des régions les plus touchées par les incendies meurtriers qui ravagent depuis le 9 août la Kabylie, région du nord-est de l'Algérie. Ceux-ci ont pour l'heure fait au moins 69 morts, dont 28 militaires qui aidaient à éteindre les incendies. Certains de ces incendies sont toujours en cours.