Biélorussie : plusieurs journalistes démissionnent en guise de protestation
Plusieurs présentateurs de chaînes de télévision et de radio publiques biélorusses ont annoncé leur décision de démissionner, alors que les protestations continuent dans les rues après la réélection d'Alexandre Loukachenko.
Huit employés de médias publics, dont des journalistes des chaînes Belarus-1 et CTV, ainsi que de la première radio biélorusse, ont démissionné le 11 août, d'après le site d'information biélorusse tut.by cité par l'agence de presse TASS. Dès le lendemain, ces journalistes étaient suivis par d'autres confrères, dénonçant à travers cet acte leur désaccord avec le comportement de l'Etat face aux nombreuses manifestations qui secouent le pays depuis la réélection d'Alexandre Loukachenko pour un sixième mandat.
Parmi ceux qui ont annoncé leur démission on retrouve notamment Evgueni Perline, animateur de la chaîne Belarus-1, qui a confirmé cette décision sur sa page Facebook: «Qu’est-ce qui est arrivé à ma Biélorussie ? Je travaille à la télé en direct depuis 2009. [...] J’ai décidé que mon émission d’aujourd’hui sur Belarus-1 était la dernière. Personne n’a influé sur cette décision, je l’ai prise moi-même.»
L'agence biélorusse ATN a également perdu son correspondant et présentateur Sergueï Kozlovitch qui a confirmé l'information avec regret. «C’était mon rêve d’enfance, auquel j’ai consacré 10 ans. Depuis le montage vidéo à [la chaîne] ONT jusqu’à mes émissions en direct à la chaîne Belarus-1. Je prendrai toujours du plaisir à travailler à l’antenne, mais c’est la dernière fois que j’étais présent sur ATN. C’est une décision personnelle,» a-t-il écrit sur sa page Instagram.
Puis, le 12 août, Vladimir Bourko, présentateur de l’émission militaire Arsenal, a à son tour annoncé sa démission de la chaîne Belarus-1 suite aux confrontations violentes entre forces de l'ordre et manifestants. «Je ne suis plus présentateur de ce projet télévisé [Arsenal], je suis parti de moi-même [...] Pendant cinq ans j’ai incarné implicitement l’image médiatique du ministère biélorusse de la Défense [...] Jamais, même dans un cauchemar, je n'aurais pu imaginer que les soldats et le matériel que je présentais pouvaient être employés contre le peuple,» a-t-il raconté sur son compte Instagram.
Le jour même, il a été suivi par sa confrère de la chaîne ONT Olga Bogatyrevitch, qui a publié une photo de sa lettre de démission sur le réseau social.
Lors des manifestations, qui ont souvent viré à l'affrontement, de nombreux journalistes, locaux ou étrangers, ont fait les frais du climat de violence ambiant. Plusieurs d'entre eux ont notamment été blessés, alors que d'autres ont été arrêtés en couvrant les rassemblements ou le scrutin du 9 août dernier. C'est notamment le cas de plusieurs journalistes russes comme Anton Starkov et Dmitri Lassenko (du média russe Daily Storm), Maxime Solopov (Meduza), des collaborateurs de l'agence vidéo Ruptly, du photographe de l'agence Sputnik Ilia Pitalev, des correspondants de la chaîne russe Dojd, ou encore du journaliste Semion Pegov, entre autres.
Deux personnes sont mortes et des dizaines ont été blessées du côté des manifestants, mais également des forces de l'ordre, dans le cadre du mouvement de protestation ayant suivi la réélection, avec 80% des voix d'après la Commission électorale centrale, d'Alexandre Loukachenko.