«Israel Files» : enquête sur le département secret qui protège les responsables israéliens
Source: APLe média belge Le Soir a révélé, le 12 décembre, l’affaire «Israel Files», issue d’une enquête qui met en lumière les activités d’un département discret du ministère israélien de la Justice, chargé de contrer les plaintes internationales visant des responsables de l’État et de retarder ou fermer des enquêtes, y compris celles de la CPI.
Dans un article publié le 12 décembre, le média belge révèle l'affaire « Israel Files ». Une enquête, menée par le réseau European Investigative Collaborations (EIC) en collaboration avec plusieurs médias et le site de lanceurs d’alerte Distributed Denial of Secrets (DDoS), qui révèle le rôle central du Département des affaires internationales spéciales, créé en 2010 au sein du ministère israélien de la Justice.
Des documents internes de 2020 montrent que ce département a œuvré pour transformer de manière irréversible la gestion par Israël des défis posés par la « guerre juridique », revendiquant la clôture de dizaines d’affaires pénales et civiles dans le monde contre l’État et ses hauts responsables, ainsi que le report pendant dix ans de l’ouverture d’une enquête de la CPI contre Israël. Contacté, le ministère israélien de la Justice n’a pas répondu aux sollicitations du média belge.
Des actions aux Pays-Bas et en France
Le département agit en coordination avec l’armée, l’administration civile et les services de renseignement israéliens, avec des financements de dizaines de millions d’euros destinés à contrer et contourner les actions judiciaires internationales. Selon les documents consultés par Le Soir, beaucoup d’interventions se sont déroulées en coulisses : aux Pays-Bas, Israël a financé les frais d’avocat d’une entreprise vendant des chiens militaires et obtenu un accord d’indemnisation avec un plaignant palestinien.
Le département a également fait classer sans suite une plainte contre l’entreprise néerlandaise Riwal, impliquée dans la construction du mur de séparation en Cisjordanie. En France, il est intervenu pour soutenir des poursuites contre des militants du mouvement BDS, malgré la protection de leur liberté d’expression par la jurisprudence européenne.
Contrer la CPI et assurer les déplacements des responsables israéliens
Depuis 2001, des plaintes ont régulièrement été déposées contre des ministres et militaires israéliens, souvent par des Palestiniens et des ONG, à l’instar de la plainte belge contre l’ex-Premier ministre Ariel Sharon. Les documents récents révèlent qu’Israël se préparait à répondre à d’éventuels mandats d’arrêt de la CPI et sollicitait des conseils d’avocats dans les États membres dès 2021.
Une mission essentielle du département consiste à évaluer les risques de voyage pour les responsables israéliens. Certains documents internes consultés par Le Soir indiquent que la Belgique était considérée comme sûre pour des visites officielles bénéficiant d’une immunité, mais certaines personnalités ont dû annuler leurs déplacements en Europe.
Le département développe également des relations privilégiées avec des procureurs, juristes internationaux et experts de l’OTAN pour obtenir soutien et appui en cas de poursuites, en Allemagne comme ailleurs. Cela aurait facilité la résolution d'une affaire concernant le meurtre d’une famille germano-palestinienne à Gaza.