Le New York Times a publié le projet présumé d’accord de paix manqué entre la Russie et l’Ukraine
Le média américain a publié les termes présumés de l'accord de paix qui avait été discuté par Moscou et Kiev au printemps 2022. Selon le NYT, les responsables américains se sont montrés défavorables à celui-ci. La Russie dénonce depuis plusieurs mois une occasion manquée en raison des ingérences occidentales.
Le New York Times (NYT) a publié le 15 juin plusieurs documents qui, selon lui, seraient des versions préliminaires de l'accord de paix négocié à Istanbul par Moscou et Kiev, au cours des premiers mois du conflit en Ukraine. Selon le média, les États-Unis et la Pologne étaient alarmés par ces propositions, craignant qu’elles ne conduisent au désarmement de l'Ukraine.
Le quotidien américain a publié trois documents. L’un, daté du 17 mars 2022, est censé être un projet de texte de traité proposé par la partie ukrainienne. La version en anglais prétendument obtenue par le NYT aurait été fournie par Kiev à ses patrons occidentaux.
Selon les termes du document, l’Ukraine a accepté un statut de neutralité permanente en échange de garanties de sécurité de la part des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France, de la Russie et de la Chine. Elle aurait également promis de ne joindre aucun bloc militaire et de mettre fin à tout accord incompatible avec son statut de neutralité.
Kiev devait également reconnaître la Crimée en tant que territoire russe et les Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk comme États indépendants, ainsi que restaurer les infrastructures détruites dans la région par ses troupes entre 2014 et 2022. Le document fixait également des limites à la quantité de matériel militaire lourd dont l’Ukraine pourrait disposer, bien que la Russie ait déclaré qu’elle ne prévoyait, en fait, pas de réduction de l’armée, selon le média.
L'Ukraine non opposée à reconnaître le rattachement de la Crimée à la Russie ?
Le document publié par le NYT est également truffé de notes critiques des deux côtés, qualifiant certaines dispositions ou formulations d’inacceptables. Les annotations, comme indiqué, ne témoignent d’aucune opposition ukrainienne à l’idée de reconnaître la Crimée comme faisant partie de la Russie ou d’accorder officiellement l’indépendance aux républiques du Donbass.
Selon le NYT, le projet d’accord n’a pas plus aux responsables américains. Lors d’une réunion avec leurs homologues ukrainiens, les Américains l’ont qualifié de désarmement unilatéral, a déclaré un haut responsable anonyme au journal. La Pologne aurait également été alarmée et aurait voulu empêcher la conclusion de l’accord. À cette fin, le président polonais, Andrzej Duda, a rencontré les dirigeants de l’OTAN en mars, a affirmé le NYT.
Le deuxième document, daté de la fin de mars, aurait été un communiqué conjoint interne, élargissant la liste des garants de la sécurité pour l’Ukraine et ajoutant que le statut de la Crimée devait être déterminé par Moscou et Kiev pendant une période de 10 à 15 ans.
Le troisième document du cache publié par le NYT serait un projet de traité daté du 15 avril 2022. En vertu de ses dispositions, l’Ukraine devait toujours devenir un pays neutre à titre permanent en échange de garanties de sécurité mais elle était autorisée à adhérer à l’UE et à participer à ses « missions de maintien de la paix ». La décision sur le statut de la Crimée devait être reportée.
Selon les notes, Kiev a refusé de discuter des sanctions contre la Russie et des réclamations juridiques mutuelles déposées auprès de divers organismes internationaux. Kiev a également refusé d’examiner des questions liées au statut de la langue russe en Ukraine ou à l’interdiction de la propagande nazie et néonazie, précise le document.
Moscou aurait exigé que toute assistance militaire future à l’Ukraine ne soit fournie que sur la base d’une décision collective prise par tous les garants de la sécurité. Cette demande s’est avérée être le plus gros problème pour Kiev, affirme le NYT ajoutant que les parties n’ont pas non plus réussi à se mettre d’accord sur l’éventail d’armes que l’Ukraine aurait été autorisée à posséder.
«Nous étions très près de mettre un terme à notre guerre par un règlement pacifique»
Certains membres de la délégation ukrainienne présents aux pourparlers pensaient encore être sur le point de parvenir à un accord. «Nous avons réussi à trouver un véritable compromis», a déclaré Alexandre Tchaly, l’un des négociateurs ukrainiens, en décembre dernier. «À la mi-avril, à la fin d’avril, nous étions très près de mettre un terme à notre guerre par un règlement pacifique.»
En début de semaine, le président russe Vladimir Poutine a également déclaré que les deux parties étaient parvenues à un accord qui «était généralement acceptable pour Moscou et pour Kiev.» Un projet de traité a été élaboré et paraphé par le chef de la délégation ukrainienne, a affirmé le président. «Cela signifie que Kiev... était satisfait de cette solution.»
Moscou n’a pas encore officiellement commenté l’authenticité des documents qui, comme l’affirme le NYT, ont été confirmés par des participants anonymes aux pourparlers. Les deux parties ne se sont pas assises sur la table des négociations depuis le printemps 2022 quand Kiev a renoncé aux négociations.
Le principal négociateur de l’Ukraine à Istanbul, David Arakhamia, a déclaré en novembre dernier que le Premier ministre britannique de l’époque Boris Johnson s’était rendu à Kiev spécifiquement pour persuader Volodymyr Zelensky de se retirer des pourparlers.
Depuis, la Russie a signalé à maintes fois qu’elle était prête à dialoguer, tout en accusant Kiev et ses partenaires occidentaux de refuser de s’engager dans la diplomatie.