Dupond-Moretti : la Haute autorité pour la transparence a-t-elle fauté à son égard ?
La Haute autorité pour la transparence de la vie publique a demandé des «précisions» sur de «possibles conflits d'intérêts» au ministre Eric Dupond-Moretti. Mais la HATVP est peut-être allée un peu vite en besogne dans la divulgation de la requête.
D'après les informations du Journal du dimanche le 10 octobre, la Haute autorité pour la transparence de la vie politique (HATVP) a possiblement commis un impair en confirmant publiquement avoir lancé une requête au garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti concernant de «possibles conflits d'intérêts».
Le 8 octobre, l'AFP avait en effet obtenu l'information auprès de la HATVP que celle-ci avait bel et bien demandé des «précisions» sur de «possibles conflits d'intérêts» au ministre de la Justice, à l'égard duquel elle dispose d'un pouvoir d'injonction.
L'entourage du ministre avait confirmé le même jour l'information à l'AFP, la HATVP demandent bel et bel à Eric Dupond-Moretti «de lui indiquer quelles mesures il avait prises pour ne pas se retrouver en situation de conflit d'intérêts, d'une part par rapport à son ancienne activité d'avocat, et d'autre part s'agissant du dossier en cours relatif au PNF [parquet national financier]».
La demande de la HATVP intervient dans un contexte de fronde dans la magistrature, à la suite de la décision du garde des Sceaux d'ouvrir une enquête administrative visant trois magistrats du PNF, dans une affaire (celle «des écoutes» concernant Nicolas Sarkozy) dans laquelle il avait lui-même porté plainte alors qu'il était avocat. Plainte retirée à son arrivée au gouvernement.
Or, d'après le JDD, la HATVP est peut-être coupable d'une infraction car «les destinataires d'une injonction de la HATVP disposent d'un mois pour y répondre et c'est seulement après ce délai que l'institution "peut décider de rendre publique" ladite injonction». Or, la demande de précisions de la part du président de la HATVP, Didier Migaud, aurait été faite le 7 octobre, soit la veille de la divulgation. Le président de l'institution a justifié pour sa part au JDD qu'ils n'avaient fait que «répondre à une question».
Dans le courrier de Didier Migaud envoyé sous pli confidentiel à Eric Dupond-Moretti, il était également demandé «divers compléments à apporter à la déclaration de patrimoine du garde des Sceaux», selon le JDD. D'aprèsLe Point du 8 octobre, il aurait mentionné dans sa déclaration de situation patrimoniale et sa déclaration d’intérêts déposées auprès de la HATVP, près de 70 000 euros d'honoraires net par mois avant sa prise de fonction politique, des droits d’auteur, des investissements défiscalisés et d'autres biens tels qu'une maison à Nice (Alpes-Maritimes) ou 3,5 hectares de vigne à Collioure (Pyrénées-Orientales) avec un autre avocat. Des fuites sur son patrimoine qui n'ont toutefois pas été confirmées par Didier Migaud.
Le fait de ne pas déférer aux injonctions de la Haute Autorité ou de ne pas lui communiquer les informations et pièces utiles est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.