Une «brèche créant un précédent» : Gérard Collomb dénonce l'accostage de l'Ocean Viking à Toulon
L'accueil du bateau de l'ONG SOS Méditerranée par la France va «encourager les réseaux de passeurs» et «renforce le problème», selon l'ancien ministre de l'Intérieur Gérard Collomb.
Interrogé par Le Point ce 13 novembre, l'ancien ministre de l'Intérieur Gérard Collomb a vivement dénoncé l'accostage de l'Ocean Viking à Toulon, car celui-ci constitue selon lui une «brèche, créant un précédent».
«Pour moi, cela ne peut qu'encourager les réseaux de passeurs pour qui les migrants sont une source de gains considérables [...] A ne s'en tenir qu'à une réaction de sensibilité, on renforce plus le problème qu'on ne le résout, en créant un appel d'air», a-t-il précisé dans les colonnes de l'hebdomadaire.
La création d'un hot spot à Toulon, raison de sa démission en 2018
L'ancien ministre de l'Intérieur avait également exprimé sur Twitter sa désapprobation deux jours plus tôt : «Au delà de l’émotion sur le sort des personnes, l’accueil en France de l’Océan Viking marque un tournant dans la politique d’immigration en France. Lorsqu’en 2018 avait été envisagée la création d’un hot spot à Toulon je m’y étais opposé de toutes mes forces et avais démissionné.»
Le meurtre devant la gare Saint Charles de Marseille des deux adolescentes Laura et Maurane, un an plus tôt, par un ressortissant tunisien en situation irrégulière l'avait, selon ses dires, profondément choqué : «si je laisse se réaliser l'installation de ce centre de contrôle, je me sentirai plus tard responsable des actes qui pourraient entraîner la mort de personnes», répond-t-il dans Le Point.
Le refoulement de plusieurs centaines de migrants au large des côtes italiennes a provoqué une querelle diplomatique entre Rome et Paris. Dans la soirée du 8 novembre, ces migrants n'ont pas été autorisés à rentrer sur le territoire italien, alors que Rome avait donné son aval pour que trois navires de secours en Méditerranée puisse accoster dans des ports italiens.
Le gouvernement de Georgia Meloni a ensuite permis à une partie – et non la totalité – des migrants de descendre à quai, au grand dam de Paris et des organisations humanitaires. Cette volte-face de Rome a provoqué l'ire du gouvernement français, Paris dénonçant le «comportement inacceptable» des autorités italiennes, «contraire au droit de la mer et à l'esprit de solidarité européenne», selon une source gouvernementale française citée par l'AFP.
Le 11 novembre, le bateau de l'ONG SOS Méditerranée opérant au large de la Libye a finalement amené les migrants en France, une première. Un accueil exceptionnel, par «devoir d'humanité», selon Gérald Darmanin. Mais en annonçant sa décision, le ministre de l'Intérieur avait indiqué qu'en guise de rétorsion, la France avait décidé de suspendre «à effet immédiat» l'accueil prévu de 3 500 migrants actuellement en Italie. La cheffe du gouvernement italien avait de son côté dénoncé une réaction française «agressive, incompréhensible et injustifiée».
Ce 13 novembre, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a fait savoir que Paris avait demandé à l'Europe «de se prononcer très rapidement sur les suites à donner». Celui-ci juge que «l'Italie se défausse de sa responsabilité sur ses voisins et ses amis français».