Brouillé avec le Bénin, aux prises avec les rebelles : le casse-tête du Niger pour exporter son pétrole
Un important projet d’oléoduc, soutenu par la Chine, visant à faire du Niger un exportateur de pétrole, fait face à une série de défis, exacerbés par la multiplication des menaces sécuritaires et une crise diplomatique avec le Bénin voisin.
Alors que la tension monte au Niger sur l’accès au pétrole sur fond de différend diplomatique avec le Bénin, une nouvelle attaque perpétrée le 25 juin par des «groupes armés terroristes» a causé la mort de vingt militaires et un civil. Un deuil national de trois jours a été décrété. L'attaque s'inscrit dans un contexte de multiplication d’actes terroristes revendiqués par des mouvements rebelles visant, entre autres, les installations pétrolières du pays.
Dans la nuit du 16 juin, un mouvement rebelle, prétendant «lutter pour la libération» du président déchu Mohamed Bazoum, a annoncé avoir mis «hors d'usage» un «important tronçon» de l'oléoduc acheminant du pétrole brut du Niger vers le Bénin, menaçant de saboter un soutien financier chinois.
Les autorités nigériennes se démènent en effet pour fructifier un accord conclu avec la Chine visant à booster la production et les exportations du pétrole du pays.
Regain de tensions entre Niamey et Porto-Novo
Le projet d’oléoduc a été facilité par un accord de 400 millions de dollars signé en avril avec la CNPC, la compagnie pétrolière nationale chinoise. Le pipeline s'étend sur 1 930 kilomètres, reliant le champ pétrolier d'Agadem, développé par des investisseurs chinois, au port de Cotonou au Bénin.
Le pipeline est conçu pour permettre au Niger, riche en pétrole mais enclavé, de multiplier presque par cinq sa production pétrolière. Il est néanmoins confronté à une série de défis exacerbés par une crise de sécurité interne et un différend diplomatique avec le Bénin voisin.
Mais ce projet fait face actuellement à une crise diplomatique avec le Bénin qui persiste depuis le coup d'État militaire en juillet 2023.
Le 5 juin dernier, un nouvel épisode de crispation entre Niamey et Porto-Novo a encore exacerbé les tensions autour du pipeline, après que cinq Nigériens ont été arrêtés au terminal pétrolier béninois de Sèmè-Kpodji.
Ce nouvel incident survenait alors que le Niger, pays enclavé, est censé débuter l’exportation de son pétrole par l’intermédiaire de l’oléoduc en question.
Le Tchad comme alternative
Pour trouver une issue, des rapports de presse internationaux ont évoqué que le Niger étudierait la possibilité de faire transiter le pétrole par le Tchad et le Cameroun voisins. Cette alternative, ainsi que celle du Nigeria, avaient déjà été envisagées initialement avant que les autorités nigériennes ne privilégient le pipeline vers le Bénin.
Or cette alternative apparaît déjà complexe, nécessitant la construction d'un nouveau pipeline et la recherche d'investisseurs.
Une préoccupation majeure réside également dans l'impact potentiel de l'arrêt du pipeline sur la croissance économique globale du Niger. La Banque mondiale, citée par AP, avait prévu que l'économie nigérienne, avec un taux de croissance projeté à 6,9 % cette année, serait la plus dynamique d'Afrique, les exportations de pétrole étant un moteur essentiel.
Des pertes de part et d’autre
Les tensions diplomatiques avec le Bénin remontent à juillet dernier, lorsque le président nigérien, Mohamed Bazoum, a été renversé lors d'un coup d'État, entraînant la fermeture des frontières par les voisins ouest-africains du Niger et la montée d’un groupe de libération local menaçant d'attaques supplémentaires contre le projet pétrolier.
Les deux nations subissent des pertes économiques significatives, le Bénin se trouvant également privé de millions de dollars en frais de transit.